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La mode des petits chiens : impact de la taille sur la santé des animaux

Publié 07/11/2019

Ecrit par Jamie L. Freyer

Aussi disponible en Deutsch , Italiano , Español et English

Pour de nombreuses raisons, les chiens de petit format deviennent de plus en plus populaires mais cette popularité a un prix. Jamie Freyer examine la situation et commente certains des points les plus importants devant être connus des cliniciens.

La mode des petits chiens : impact de la taille sur la santé des animaux

Points Clés

Les chiffres récents montrent que la population des petits chiens augmente dans de nombreux pays.


Dans ce contexte, certains éleveurs cherchent à créer des versions de races populaires de plus en plus petites.


Il existe plusieurs façons de réduire la taille d’une race mais toutes ont des inconvénients, notamment des effets néfastes sur la santé d’une race de chiens.


Les maladies courantes des petits chiens peuvent différer de celles des chiens plus grands et les vétérinaires doivent anticiper ces changements.


Les petits chiens ayant tendance à présenter plus de troubles du comportement, la demande en consultations comportementales risque d’augmenter à l’avenir.


Les vétérinaires doivent savoir identifier ces problèmes afin d’aider leurs clients à prendre les meilleures décisions pour leurs animaux.


Introduction

Partout dans le monde, la population des chiens de petite taille est en hausse. Si les petits chiens ont toujours eu du succès dans certains pays comme le Japon, le Brésil et les Philippines, leur nombre a augmenté dans les pays qui avaient tendance à préférer les grandes races 1 2. Selon les données de Banfield, la plus grande chaîne de cliniques vétérinaires aux Etats-Unis, la proportion de petits chiens vus en consultation dans leurs cliniques a augmenté de 6 % au cours des dix dernières années, alors que les nombres de chiens géants et moyens ont diminué respectivement de 17 % et 8,6 % (données non publiées), comme l’indique la Figure 1. Le British Kennel Club a également déclaré 3 que la taille moyenne des chiens de compagnie a diminué d’environ 2,5 cm en 25 ans, et qu’une différence croissante a été observée chez les races ayant des variétés standard et naines, les sous-types nains gagnant en popularité aux dépens de leurs homologues plus grands. De même, des études australiennes ont montré que les tendances récentes penchent vers les races plus petites avec des crânes plus larges 4. Plusieurs explications à ce changement ont été proposées, dont le fait que ces chiens peuvent lever des réticences à l’acquisition chez les propriétaires, ayant tendance à coûter moins cher à entretenir, et que les petits animaux sont tout simplement mieux adaptés au milieu urbain. Les chiens de petites races peuvent également être séduisants pour d’autres raisons : ils sont par exemple plus faciles à transporter, ils vivent souvent plus longtemps et peuvent bien sûr faire d’excellents compagnons. Mais quelle que soit la cause, il est important d’examiner l’effet que cette mode des petits chiens a sur la médecine vétérinaire et sur la santé globale de nos amis canins.

Evolution de la taille des chiens examinés dans les hôpitaux Banfield au cours des 10 dernières années.
Figure 1. Evolution de la taille des chiens examinés dans les hôpitaux Banfield au cours des 10 dernières années. © Banfield Pet Hospital

Comment peut-on réduire la taille d’une race ? 

L’analyse en composantes principales (PCA) est une méthode automatique de regroupement des génotypes testés qui permet de comparer les similarités des séquences d’ADN. Des échantillons étroitement apparentés, comme ceux de chiens d’une même race, sont censés se regrouper en raison des similarités de leur patrimoine génétique. Ce graphique d’ACP illustre les différences de signatures génétiques entre les variétés standard, miniature et géante de Schnauzers, montrant le nombre de différences génétiques pouvant apparaître au fil des générations par le simple fait de sélectionner un caractère comme la taille.
Figure 2. L’analyse en composantes principales (PCA) est une méthode automatique de regroupement des génotypes testés qui permet de comparer les similarités des séquences d’ADN. Des échantillons étroitement apparentés, comme ceux de chiens d’une même race, sont censés se regrouper en raison des similarités de leur patrimoine génétique. Ce graphique d’ACP illustre les différences de signatures génétiques entre les variétés standard, miniature et géante de Schnauzers, montrant le nombre de différences génétiques pouvant apparaître au fil des générations par le simple fait de sélectionner un caractère comme la taille. © Mars Veterinary

Outre le fait de favoriser les petites races déjà existantes, les éleveurs ont tendance à réduire encore la taille des petits chiens. Il existe un certain nombre de moyens de créer des variétés naines ou Toy dans une race, chacun ayant ses avantages et ses inconvénients. Par exemple, les petits individus d’une race peuvent être accouplés entre eux afin de diminuer progressivement la taille d’une lignée particulière. Cette manière de sélectionner un caractère spécifique, notamment lorsque les animaux accouplés ont un certain degré de parenté, est qualifiée de croisement consanguin. Les puristes des races ont tendance à préférer cette approche, car elle permet de maintenir la génétique de la race au plus près de celle de la race d’origine. Mais tout type de croisement consanguin finit par modifier l’aspect génétique fondamental ou la signature génétique d’une race, entraînant des différences avec les autres membres de la race (Figure 2). Cette méthode est assez lente et peut nécessiter plusieurs générations pour obtenir l’effet désiré. Elle peut également produire des chiens dits rétrogrades, c’est-à-dire des individus de grande taille apparaissant, parfois après plusieurs générations, dans des portées de races dont la taille a été réduite de cette manière. Ce type de sélection génétique diminue également la diversité de la population, ce qui peut ancrer des maladies génétiques et avoir des effets néfastes sur le système immunitaire des animaux en question. 

Le Shetland à gauche arbore une robe merle, couleur principalement observée chez les races de chiens de berger. Mais, malheureusement pour ceux qui souhaiteraient introduire cette couleur dans leurs lignées, un certain nombre des races de chiens de berger sont également porteuses de la mutation MDR1 (multi-drug resistance 1).
Figure 3. Le Shetland à gauche arbore une robe merle, couleur principalement observée chez les races de chiens de berger. Mais, malheureusement pour ceux qui souhaiteraient introduire cette couleur dans leurs lignées, un certain nombre des races de chiens de berger sont également porteuses de la mutation MDR1 (multi-drug resistance 1). © Michael Korcek/IvanLee Shelties

Une seconde méthode consiste à introduire d’autres races, plus petites, dans une lignée afin de faciliter une miniaturisation plus rapide. C’est évidemment la méthode de choix pour ceux qui souhaitent accélérer le processus de réduction de la taille, car elle permet d’obtenir des chiens plus petits en un seul croisement. Dans ce cas toutefois, il faut faire particulièrement attention à la génétique des chiens ajoutés à la population en raison du risque d’introduction de nouvelles maladies génétiques de la race la plus petite. Par exemple, la robe merle est un caractère commun à beaucoup de races de chiens de berger qui est devenu assez prisé (Figure 3). Ces dernières années, elle a été introduite dans un certain nombre de races jusque- là non porteuses du gène, dont le Cocker Américain et le Chihuahua. Des problèmes de santé, dont la surdité et la microphtalmie, peuvent être observés chez les chiens homozygotes pour le gène merle (dont le mode de transmission est dominant), mais d’autres risques génétiques peuvent entrer en jeu. Les chiens de berger sont également souvent porteurs de la mutation du gène ABCB1 (communément appelé MDR1), associée à une hypersensibilité à certains médicaments tels que l’ivermectine. Comme ces chiens peuvent être à la fois porteurs du gène merle et du gène MDR1, il ne serait pas surprenant d’observer, dans certaines races où le gène merle a été introduit, des réactions médicamenteuses, par le biais d’une sorte de covoiturage génétique induit par l’Homme.

Les animaux issus du croisement de deux races pures sont parfois appelés « chiens de concepteur », et les éleveurs et les propriétaires de ces chiens peuvent croire qu’ils ne sont pas à risque de maladie héréditaire puisqu’ils ne sont pas de race pure. Cependant, une étude récente a indiqué qu’environ 40 % des chiens hybrides possédaient au moins un facteur de risque de maladie d’origine génétique 5 et les vétérinaires doivent être conscients que ces problèmes peuvent réellement exister dans ce type de croisements si les races en question ont des origines génétiques similaires. Outre les mutations reconnues responsables de maladies génétiques, de nombreuses maladies semblent avoir une composante héréditaire, dont la cause génétique sous-jacente n’est pas encore identifiée. Par exemple, de nombreux cancers semblent être surreprésentés dans certaines races, et nous ignorons si le croisement avec ces races pourrait entraîner un risque également accru de cancer chez les descendants. 

Le Teckel est l’une des nombreuses races porteuses du gène des membres raccourcis dit chondrodysplasie. À la différence des races où il a été introduit plus récemment, le Teckel a toujours ce caractère.
Figure 4. Le Teckel est l’une des nombreuses races porteuses du gène des membres raccourcis dit chondrodysplasie. À la différence des races où il a été introduit plus récemment, le Teckel a toujours ce caractère. © Banfield Pet Hospital

La sélection du caractère chondrodysplasie est un troisième moyen de miniaturiser une race, et les éleveurs peuvent l’utiliser pour conférer une stature plus petite et une apparence souvent jugée attachante. La chondrodysplasie correspond au raccourcissement des membres dû à un développement anormal des cartilages et des os. Si dans certaines races, ce caractère est permanent et donc toujours apparent (comme le Teckel, le Basset Hound et le Corgi), il existe de manière intermittente dans d’autres races ou il y a été introduit (Figure 4). Cependant, beaucoup de gens ignorent les problèmes de santé associés à cette morphologie plus allongée et plus basse. Arthrose, discopathies intervertébrales, dysplasie coxo-fémorale et un certain nombre d’autres maladies courantes chez les races chondrodysplasiques sont étroitement associées à leur conformation. La sélection sur ce caractère peut donc entraîner l’introduction au sein d’une race d’un tout nouvel ensemble de problèmes de santé.

Quels problèmes peuvent surgir avec les races miniaturisées ?

Outre les maladies génétiques et troubles orthopédiques liés à la chondrodysplasie évoquée ci-dessus, la tendance à la miniaturisation est associée à d’autres problèmes. Tout d’abord, comme pour tout ce qui est à la mode, plus la demande est grande, plus les gens sont susceptibles de vouloir en tirer un bénéfice personnel. Malheureusement, des individus irresponsables peuvent saisir l’occasion de ces modes telles que la miniaturisation dans le seul but de gagner de l’argent facilement. Cela peut conduire à des pratiques potentiellement dangereuses pour la santé des chiots qu’ils vont vendre. Ils peuvent par exemple utiliser des méthodes contraires à l’éthique, comme le croisement d’individus chétifs pour produire des animaux plus petits, la vente de chiots à un âge extrêmement jeune (en abusant éventuellement les propriétaires sur l’âge réel des animaux) ou la sous- nutrition visant à freiner la croissance des chiots. Certains vont même jusqu’à importer de très jeunes chiots de races naines d’autres pays, leur faisant subir des milliers de kilomètres en avion à un âge et dans un état pouvant rendre ce type de voyage dangereux.

Deuxièmement, il est important que les vétérinaires tiennent compte du fait que les maladies courantes des petits chiens diffèrent très souvent de celles de leurs congénères de grande taille. Les différences de santé bucco-dentaire sont particulièrement édifiantes. Les chiens de petite taille, par exemple, sont plus susceptibles que les grands chiens d’avoir des dents déciduales persistantes et de souffrir de maladie parodontale. Les explications proposées incluent la petite taille de leurs mâchoires et le chevauchement de leurs dents, bien que les recherches sur ce sujet soient toujours en cours. En outre, les mâchoires petites et fines de ces chiens renferment moins d’os, ce qui les rend plus sujettes au déchaussement dentaire, à l’ostéopénie pathologique, voire spontanée en cas de maladie parodontale avancée. 

Image échocardiographique d’une maladie valvulaire dégénérative mitrale. La maladie valvulaire dégénérative est beaucoup plus fréquente chez les petites races canines.
Figure 5. Image échocardiographique d’une maladie valvulaire dégénérative mitrale. La maladie valvulaire dégénérative est beaucoup plus fréquente chez les petites races canines. © Kate Scollan DVM, Dipl. ACVIM (Cardiology)

La santé bucco-dentaire n’est pas le seul domaine où s’observent les différences. Par exemple, le collapsus trachéal, pratiquement inconnu chez les grands chiens, n’est pas rare chez les races petites et naines, et la maladie valvulaire dégénérative mitrale, une des principales causes de cardiopathie canine, est également beaucoup plus fréquente chez les petites races 6 (Figure 5). Les causes de boiterie sont également très différentes chez les petits et les grands chiens. Par exemple, le diagnostic différentiel d’une boiterie postérieure chez une petite race inclut la luxation médiale de la rotule et la maladie de Legg-Calvé- Perthes, contrairement à la rupture du ligament croisé et à la dysplasie coxofémorale, fréquentes chez les grandes races. La dystocie par disproportion materno-foetale, rendant la césarienne nécessaire, est aussi plus fréquente chez les petits chiens. Elle est particulièrement importante chez les chiens miniatures à grosse tête, qui sont nombreux chez les petites races brachycéphales.

Autre sujet de préoccupation vétérinaire, les réactions indésirables liées aux actes courants. Bien que la majorité des médicaments vétérinaires oraux et injectables soient administrés en fonction de la taille des animaux, les petits chiens sont par exemple plus sujets aux réactions vaccinales 7. Les races canines naines peuvent être plus sujettes aux complications anesthésiques comme l’hypothermie, et être plus difficiles à surveiller lors d’une anesthésie 8. Même les causes les plus fréquentes de mortalité diffèrent entre les grands et les petits chiens. Par exemple, alors que les chiens de grandes races meurent ou sont euthanasiés majoritairement pour cause de tumeurs et de troubles musculo-squelettiques et digestifs, les principales causes de mortalité chez les petites races incluent plutôt des maladies urogénitales, dégénératives, cardiovasculaires ou métaboliques 9.

Les problèmes présentés par les races petites et naines ne sont qu’amplifiés dans les versions miniaturisées de ces races. Chez ces chiens, la finesse et la fragilité des os, associées à leur tendance à traîner dans nos pieds, peuvent faire des désastres. Les fractures peuvent survenir après une chute ou un saut d’une faible hauteur, après s’être fait marcher ou asseoir dessus, ou même après un jeu un peu vigoureux. Les chiens miniaturisés peuvent également être prédisposés à des anomalies telles que la persistance des fontanelles et l’hydrocéphalie. En raison de leur tout petit corps, les chiens de races miniatures et naines ont également plus de risques d’être touchés gravement par des phénomènes potentiellement insignifiants chez les chiens plus grands. Par exemple, les chiens miniatures sont plus susceptibles de souffrir de déshydratation sévère suite à des maladies diarrhéiques que les grands chiens, d’où une plus grande urgence de soins vétérinaires chez eux que chez un Labrador ou un Berger Allemand atteint du même type de maladie. Les chiens nains et miniatures peuvent également avoir besoin d’être nourris plusieurs fois par jour, de par leur tendance à l’hypoglycémie. Il faut aussi rappeler que le fait de donner une bouchée de nourriture humaine de temps en temps à un chien nain équivaut à donner un cheeseburger entier à un chien de grande race, c’est pourquoi l’obésité et les carences ou déséquilibres nutritionnels sont de vrais sujets de préoccupation chez ces animaux (Figure 6). La majorité des propriétaires de chiens ne se rendent pas compte de l’importance de ces différences, d’où la nécessité de les sensibiliser.

Si les chiens reçoivent souvent de la nourriture humaine en guise de friandise, les propriétaires ne réalisent pas forcément que, même en petite quantité, l’alimentation humaine peut représenter un pourcentage important des besoins énergétiques journaliers d’un animal. En règle générale, les friandises et aliments pour humains ne doivent pas dépasser 10 % du total des calories quotidiennes afin d’éviter les déséquilibres et carences nutritionnels.
Figure 6. Si les chiens reçoivent souvent de la nourriture humaine en guise de friandise, les propriétaires ne réalisent pas forcément que, même en petite quantité, l’alimentation humaine peut représenter un pourcentage important des besoins énergétiques journaliers d’un animal. En règle générale, les friandises et aliments pour humains ne doivent pas dépasser 10 % du total des calories quotidiennes afin d’éviter les déséquilibres et carences nutritionnels. © Banfield Pet Hospital
 L’ingestion de colostrum dans les 12 à 16 premières heures suivant la naissance est essentielle à la croissance et à la survie des chiots nouveau-nés. Les plus petits chiots d’une portée peuvent être désavantagés, leur capacité de succion étant souvent inférieure à celle de leurs frères et soeurs plus gros.
Figure 7. L’ingestion de colostrum dans les 12 à 16 premières heures suivant la naissance est essentielle à la croissance et à la survie des chiots nouveau-nés. Les plus petits chiots d’une portée peuvent être désavantagés, leur capacité de succion étant souvent inférieure à celle de leurs frères et soeurs plus gros. © Michael Korcek/IvanLee Shelties

Ces effets indésirables liés à la réduction de taille peuvent aussi s’observer au sein d’une même portée. Les plus petits chiots d’une portée peuvent avoir une moindre capacité à réguler leur température et leur glycémie et également à téter. Cette succion inefficace risque d’entraîner une consommation insuffisante de colostrum qui, à son tour, peut se traduire par un certain nombre d’effets néfastes. L’ingestion d’une quantité suffisante de colostrum permet une croissance appropriée en début de vie et influence aussi le maintien de la normothermie et de la normoglycémie (Figure 7). A l’inverse, une consommation insuffisante de colostrum risque d’exacerber les problèmes déjà observés chez ces chiots. Le colostrum contribue également à l’augmentation de la taille et de la surface des intestins en tout début de période néonatale 10. Une croissance intestinale réduite peut diminuer la capacité du chiot à absorber les nutriments. Tous ces effets combinés entraînent un risque de mortalité néonatale beaucoup plus élevé chez ces chiots, notamment dans les 48 heures suivant la naissance. Il a également été suggéré que la consommation réduite de colostrum chez certaines espèces pourrait conduire à des troubles auto-immuns et à d’autres dysfonctionnements du système immunitaire pendant toute la vie de l’animal 11.

Petits chiens et problèmes de comportement

Outre la santé générale, le comportement est un aspect essentiel du suivi vétérinaire, et il peut avoir un impact considérable sur la relation Homme-animal. Les troubles du comportement sont l’un des premiers motifs d’abandon de chiens dans les refuges 12. Une corrélation négative a été mise en évidence entre la taille d’un chien et le nombre de comportements problématiques qu’il présente 13. Dans une étude menée sur les comportements indésirables des chiens en fonction de leur taille et de leur poids, les coefficients de régression pour les 14 catégories comportementales (agressivité envers les inconnus/propriétaires/chiens, rivalité entre chiens, peur des inconnus/chiens, phobie non sociale, sensibilité au toucher, problèmes de séparation, hyperattachement et recherche d’attention, difficultés d’éducation, comportement de chasse, excitabilité et niveau d’énergie) étaient tous négatifs sauf pour les difficultés d’éducation et la peur des inconnus 13. Sur les 22 autres comportements divers examinés dans l’étude, la majorité était également négativement corrélée avec la taille, indiquant l’existence d’une corrélation significative entre les mauvais comportements et la taille réduite chez le chien.

Ces résultats remettent en cause l’origine du lien entre un comportement inapproprié et une taille réduite : ces comportements sont-ils d’origine génétique ou sont-ils renforcés par la façon dont sont traités les animaux de petite taille ? L’effet du comportement humain sur celui des animaux de compagnie est probablement très important. Il se peut que les propriétaires tolèrent divers comportements chez les petits chiens qu’ils ne tolèreraient pas chez des chiens plus grands. Par exemple, la plupart des propriétaires s’alarment clairement quand un grand chien montre de l’agressivité ou saute sur les gens, alors que ce même comportement chez un petit chien peut ne pas être considéré comme problématique. Certains comportements sont même jugés « mignons » et donc encouragés par le propriétaire. En outre, le propriétaire d’un petit chien peut ne pas exiger de ce dernier qu’il réponde aux ordres, peut le porter plutôt que de le laisser marcher et peut le surprotéger, ce qui risque d’interférer avec sa socialisation avec les autres personnes et les autres chiens.

Bien que l’environnement ou l’éducation puissent être impliqués dans le comportement de nombreux petits chiens, une prédisposition génétique peut également intervenir. En effectuant une sélection sur la petite taille, les humains ont peut-être intensifié involontairement ces prédispositions aux problèmes comportementaux. Il se peut aussi qu’il existe des causes physiologiques à certains « mauvais » comportements observés chez les chiens miniatures, tels que les problèmes d’apprentissage de la propreté liés à leur faible capacité vésicale, qui obligera les propriétaires à sortir ces chiens plus fréquemment que leurs homologues de plus grande taille. Quelle que soit la cause, il est intéressant de constater cette corrélation entre taille et comportement. L’éducation des propriétaires sera essentielle pour s’assurer qu’ils ont conscience des risques et qu’ils sauront comment prévenir ces problèmes avant leur apparition.

Et maintenant ?

Il est particulièrement révélateur qu’un certain nombre de clubs de races naines abordent les problèmes liés à la miniaturisation, et cela permet d’attirer l’attention des futurs acheteurs sur ce qui n’est pas souhaitable. Le Code d’éthique du Yorkshire Terrier Club of America stipule que « La publicité par un membre [...] ne doit pas utiliser des termes tels que “chiens de poche”, “tête de poupée” ou toute terminologie similaire ». Le site internet du Chihuahua Club of America inclut également une mention sur l’utilisation trompeuse de termes tels que chien de poche et déclare : « Nous reconnaissons que les amateurs de Chihuahuas veulent souvent acquérir les plus petits chiots. Bien qu’ils soient adorables et puissent être en parfaite santé, l’acheteur doit être averti des soins supplémentaires qui pourront être nécessaires à leur santé générale et à leur bien-être », et le standard de l’American Kennel Club (AKC) du Jack Russell Terrier indique que « toute suspicion d’achondroplasie » est un défaut grave et déconseille de mettre ces chiens à la reproduction en vue d’expositions canines.

Si l’AKC déclare qu’il n’inscrit ni n’approuve les races de poche, le Kennel Club britannique va encore plus loin. Il a en effet publié un communiqué sur les chiots de poche qui aborde les problèmes de santé susceptibles de toucher ces animaux, en insistant sur les pratiques peu scrupuleuses utilisées par certains « éleveurs » et en indiquant qu’il ne reconnaît ni n’enregistre ces chiens miniaturisés. Ce communiqué conclut en soulignant que les standards du Kennel Club insistent sur le fait que « les éleveurs ne doivent pas exagérer les caractéristiques raciales, dont celles liées à la taille, et les acheteurs de chiots sont fortement invités à s’assurer avant l’achat que ni le chiot ni ses parents n’ont une apparence exagérée. Déroger à ces recommandations risque d’entraîner de sérieux problèmes de santé à l’avenir. » 

Le vétérinaire doit pouvoir aborder divers sujets avec un nouveau propriétaire de chien de petite race, notamment :

• les troubles du comportement éventuels et les pièges à éviter dans l’éducation de certains petits chiens
• les maladies et problèmes de santé courants et spécifiques de certaines races
• les questions importantes relatives à l’alimentation, à la nutrition et aux soins dentaires chez les petits chiens

Encadré 1.

Encouragés par les photos de célébrités arborant de minuscules chiots de poche, les futurs propriétaires peuvent croire que l’un de ces mini-chiens ferait un compagnon idéal. De l’extérieur, il peut sembler facile et chic de posséder ce type de chien, et un chien miniature peut ressembler à l’accessoire parfait. Mais malgré leur taille réduite, les chiens miniatures restent des chiens et nécessitent autant de soins et d’entretien que leurs congénères de grande taille. Bien que leurs problèmes de santé puissent être différents de ceux des grands chiens, ils n’en sont pas moins importants et peuvent même, dans certains cas, être plus complexes. Ces chiens peuvent notamment avoir des besoins non anticipés par les personnes ne connaissant pas bien les chiens, et même celles qui sont habituées aux chiens plus grands peuvent être surprises par certaines difficultés rencontrées par les chiens nains. Les problèmes de comportement peuvent se révéler plus nombreux, plus graves, et peuvent s’ancrer plus facilement que chez les grands chiens. Il serait donc prudent que le vétérinaire aborde certains points avec toute personne qui envisage d’acheter ou vient d’acheter un chiot de petite race (Encadré 1). Sachant que la mode des chiens de plus en plus petits ne semble pas près de se terminer, les vétérinaires doivent être en mesure d’accompagner leurs clients dans les différentes difficultés inhérentes à ces animaux.

Bibliographie

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Jamie L. Freyer

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