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Veterinary Focus

Numéro du magazine 26.1 Gastro-intestinal

Le parvovirus canin

Publié 24/03/2021

Ecrit par Nicola Decaro

Aussi disponible en Deutsch , Italiano , Español et English

Le parvovirus canin (CPV) est un petit virus non enveloppé constitué d’une capside sphérique (composée de trois protéines : VP1, VP2 et VP3) contenant une molécule d’ADN, simple brin linéaire codant pour deux protéines non structurelles (NS1 et NS2) et deux protéines structurelles (VP1 et VP2). 

Image en microscopie électronique de particules de parvovirus colorées négativement (grossissement x 25.000).

Key points

Le parvovirus canin est le principal agent responsable de gastroentérite aiguë chez les jeunes chiots et il est présent dans le monde entier.


Trois variants antigéniques ont totalement remplacé la souche originale, et leur distribution varie selon les zones géographiques.


Les signes cliniques caractéristiques incluent vomissements, diarrhée hémorragique et leucopénie, et les taux de mortalité peuvent atteindre 60-70 % dans les élevages et refuges infectés.


Les tests de dépistage à réaliser à la clinique sont peu sensibles, et d’autres analyses basées sur la méthode PCR peuvent être nécessaires.


Le traitement est essentiellement symptomatique, même si plusieurs antiviraux ont été évalués.


La vaccination des chiots reste la stratégie la plus efficace pour contrôler l’infection, malgré une possible interférence avec les anticorps d’origine maternelle et une inadéquation suspectée entre les virus vaccinaux et les souches sauvages.


Introduction

Le parvovirus canin (CPV) est un petit virus non enveloppé (Figure 1) constitué d’une capside sphérique (composée de trois protéines : VP1, VP2 et VP3) contenant une molécule d’ADN, simple brin linéaire codant pour deux protéines non structurelles (NS1 et NS2) et deux protéines structurelles (VP1 et VP2). VP2, la principale protéine de la capside, est responsable de l’antigénicité du virus 1 2. La nomenclature de la famille des Parvoviridae a été récemment révisée, le CPV étant désormais inclus dans l’espèce unique Carnivore proto-parvovirus 1 avec le virus de la panleucopénie féline (FPV) et d’autres parvovirus apparentés des carnivores 3.
 

Figure 1. Image en microscopie électronique de particules de parvovirus colorées négativement (grossissement x 25.000). © Nicola Decaro

 

Le CPV est le principal agent responsable de gastroentérite aiguë chez les chiots âgés de 1 à 6 mois. Bien qu’il ait été identifié dès la fin des années 1970, ce virus représente toujours une menace majeure pour les jeunes chiens du fait de la sévérité des signes cliniques qui lui sont associés, et de l’interférence entre l’immunisation active et les anticorps d’origine maternelle (AOM) pouvant compromettre le programme de vaccination 1 2. Un autre obstacle au contrôle de la maladie est la circulation de variants sauvages (CPV-2a, CPV-2b, CPV-2c) antigéniquement distincts de la souche originale CPV-2, qui reste contenue dans la majorité des vaccins du marché. Le CPV-2 et ses variants antigéniques ne diffèrent que par quelques acides aminés, mais il a été suggéré que la vaccination pourrait n’offrir qu’une protection partielle, qui risquerait d’exposer les chiens vaccinés à l’infection par les souches sauvages et parfois à l’apparition de la maladie clinique 4 5 6. L’incidence accrue de la maladie chez les chiens adultes 4 5 ainsi que la capacité des variants antigéniques à infecter les chats, induisant des signes cliniques identiques à ceux de la panleucopénie féline 7 8, sont de nouveaux problèmes auxquels il faut faire face. Cet article s’intéressera aux aspects cliniques, pathologiques et diagnostiques de la parvovirose canine, en récapitulant brièvement la situation épidémiologique actuelle dans différents pays et les protocoles de vaccination recommandés.

Épidémiologie

La souche CPV-2 originale est apparue à la fin des années 1970, probablement en conséquence d’un changement d’hôte du FPV suite à une adaptation antérieure du virus à une espèce inconnue de carnivore sauvage. Au début des années 1980, le virus original a soudain été remplacé par deux variants antigéniques, CPV-2a et CPV-2b, via 5 ou 6 substitutions d’acides aminés sur la protéine de capside VP2, et un troisième variant, CPV-2c, a été décrit en Italie en 2000 9.

Actuellement, la souche originale CPV-2, toujours présente dans la majorité des formulations de vaccins, ne circule plus sur le terrain tandis que ses trois variants antigéniques sont variablement distribués dans le monde entier. En Europe continentale, les variants semblent co-circuler, avec une prévalence des types 2a et 2b au Portugal, en France et en Belgique, des types 2a et 2c en Italie, du type 2a en Europe de l’Est, et du type 2c dans la péninsule Ibérique, les trois variants étant distribués de manière égale en Allemagne. L’Amérique du Nord et l’Amérique du Sud affichent une fréquence respectivement élevée des CPV-2b/2c et des CPV2a/2c ; en Asie et dans les îles isolées telles que le Royaume-Uni, l’Australie et le Japon, les types 2a et 2b prédominent 1 2. Les quelques publications relatives à l’Afrique indiquent une co-circulation des trois souches dans le nord du continent et une fréquence élevée des CPV-2a et 2b dans le sud 10.

Le CPV est capable d’infecter les chiens domestiques, les loups et d’autres carnivores sauvages, chez lesquels des virus intermédiaires entre le CPV-2 et le CPV-2a ont été fréquemment isolés 11. La souche CPV-2 originale pouvait infecter les cellules félines in vitro mais pas in vivo, mais les nouveaux variants antigéniques peuvent infecter les chats, induisant une maladie impossible à distinguer de la panleucopénie féline 7 8. Théoriquement, il n’y a pas de prédisposition raciale à la parvovirose canine. Les grandes races, comme le Berger Allemand, le Labrador, le Rottweiler, l’Alaskan Malamute et le Doberman, semblent être plus à risque, mais cela pourrait être dû au fait que les taux d’AOM chutent plus rapidement chez les chiots de grand format à croissance rapide que chez les chiots de petit format 1 2. En outre, bien que l’infection par le CPV et la maladie clinique touchent principalement les chiots de moins de 6 mois, des signes cliniques sévères, souvent associés à l’infection par le CPV-2c, sont décrits de plus en plus fréquemment chez les chiens adultes 5 6.

Les selles des chiots infectés constituent la principale source du virus dans l’environnement, virus qui est exceptionnellement stable et qui peut rester infectant pendant des semaines voire des mois. Les chiots naïfs sont infectés via la voie oro-nasale par contact direct ou indirect 1 2.


Pathogénie

Les tissus cibles pour la réplication virale sont les cryptes intestinales et les organes lymphoïdes, mais le virus peut gagner tous les tissus. Après pénétration dans l’organisme, le CPV se réplique principalement dans les tissus lymphoïdes associés à l’oropharynx, le thymus, les nœuds lymphatiques mésentériques et les plaques de Peyer, entraînant une nécrose extensive, avant de se propager dans le sang, essentiellement par le biais de lymphocytes infectés. La virémie est longue (le virus peut être détecté jusqu’à 60 jours par PCR en temps réel) et entraîne la colonisation des cryptes de l’intestin grêle, où la réplication virale active induit une lyse rapide des cellules souches. Conséquence directe, le renouvellement de l’épithélium des extrémités des villosités est altéré, ce qui provoque une diarrhée. L’excrétion fécale du virus commence 2-3 jours après l’infection et dure jusqu’à 45-50 jours, mais des taux d’excrétion élevés ne sont observés que pendant les 7 à 10 premiers jours. Chez les chiots nouveau-nés (jusqu’à l’âge de 2-3 semaines), le CPV est capable de se reproduire dans les cellules myocardiques en multiplication active, engendrant une myocardite sévère, mais ces cas sont sporadiques 1 2. Par rapport au type 2 original, les variants antigéniques sont caractérisés par une pathogénicité supérieure, une période d’incubation plus courte (moins de 4-5 jours), des signes cliniques plus sévères, une excrétion virale plus importante et plus longue, et une dose minimale infectante inférieure 12. La co-infection par le coronavirus canin (CCoV) risque d’aggraver les signes cliniques, le CPV et le CCoV infectant l’épithélium intestinal respectivement au niveau des cryptes et des extrémités des villosités 1 2.


Signes cliniques et pathologie

Comme nous l’avons déjà dit, la période d’incubation de la souche CPV-2 originale allait jusqu’à 7 jours alors que les nouveaux variants n’ont généralement besoin que de 3-4 jours pour faire apparaître des signes cliniques. Selon l’âge et le statut immunitaire du chien, l’infection par le CPV peut entraîner différentes formes cliniques de la maladie, allant d’une infection subclinique à une gastroentérite aiguë et (très rarement) une myocardite.

Infections subcliniques

Les infections subcliniques s’observent généralement chez les chiots ayant des taux intermédiaires d’AOM (titres d’anticorps inhibant l’hémagglutination compris entre 1/20 et 1/80) qui les protègent de la maladie clinique mais pas de l’infection. Des différences de taux d’AOM entre les chiots d’une même portée pourraient expliquer pourquoi certains chiots expriment des formes cliniques sévères tandis que d’autres ne montrent pas ou peu de signes. Les chiens adultes peuvent également être infectés et ne montrer que peu ou pas de signes, en raison de la maturité supérieure de leur muqueuse intestinale. Quelques signes peu spécifiques sont parfois observés, comme par exemple une léthargie et une baisse d’appétit pendant 2-3 jours, avec leucopénie modérée et transitoire. Les infections subcliniques revêtent une importance particulière dans les élevages et les refuges, où la présence d’animaux porteurs sains pourrait favoriser la propagation du virus aux autres chiots 1 2 12.

Forme gastro-intestinale

C’est la forme de parvovirose la plus fréquemment observée chez les chiots âgés de 1 à 6 mois, bien qu’un nombre croissant de cas soient décrits chez l’adulte. Après 3-4 jours d’incubation, les chiots développent une anorexie, une dépression et des vomissements, puis une diarrhée, entraînant une déshydratation sévère. La diarrhée est souvent, mais pas toujours, hémorragique, les selles contenant des filets de sang ou du sang digéré (noir). Une fièvre (à 40-41 °C) peut être présente, mais n’est pas toujours observée. A l’inverse, une leucopénie est souvent observée, avec un nombre de leucocytes inférieur à 2000-3000/μL. Notons que le nombre total de leucocytes peut être normal, la lymphopénie induite par le virus pouvant être compensée par une neutrophilie concomitante liée à des infections bactériennes opportunistes. Ces bactéries aggravent souvent l’évolution clinique de la maladie, en induisant d’autres signes tels qu’une détresse respiratoire, aboutissant à la mort. Le degré de leucopénie est un facteur pronostique reconnu ; il a été décrit que les chiots ayant un nombre de leucocytes inférieur à 1000/μL ont peu de chances de survivre. Une mortalité peut être observée dès 48 heures après l’apparition des signes cliniques, en conséquence d’une dissémination bactérienne ou d’une coagulation intravasculaire disséminée. Les taux de mortalité peuvent fortement varier en fonction de l’âge et du statut immunologique de l’animal, et ils sont généralement inférieurs à 1 % chez les adultes 1 2.

Les chiots qui meurent d’une entérite parvovirale sont extrêmement déshydratés. A l’autopsie, des lésions macroscopiques sont visibles sur le tube digestif, principalement localisées au duodénum puis au jéjunum. Des lésions de gastroentérite hémorragique sont le plus souvent observées (Figure 2), la paroi intestinale étant généralement épaissie et décolorée par segments, et la surface séreuse pouvant être rouge foncé ou pourpre et parfois recouverte de fibrine. L’intestin peut être complètement vide ou contenir des matières sombres (souvent sanguinolentes) ou du liquide hémorragique. Les nœuds lymphatiques et les plaques de Peyer sont hypertrophiés et congestionnés, et présentent souvent des hémorragies disséminées dans le cortex et sur la surface de coupe (Figure 3). A l’histologie, l’intestin grêle présente une nécrose multifocale des cryptes et des corps d’inclusion intranucléaire, tandis qu’une déplétion importante en lymphocytes est observée au niveau des plaques de Peyer, des nœuds lymphatiques, de la rate et du thymus. Un œdème pulmonaire et une alvéolite peuvent être visibles en cas de complications bactériennes 1 2

Figure 2. Anses de grêle congestionnées chez un chiot mort d’une entérite parvovirale. © Nicola Decaro

Figure 3. Nœud lymphatique mésentérique chez un chiot mort d’une entérite parvovirale : notez la lymphadénite hémorragique. © Nicola Decaro

Forme myocardique

Les myocardites aiguës ont été fréquentes lors de la première épidémie mondiale de parvovirose quand une population de chiens naïfs a été infectée, mais cette forme n’est désormais observée que de manière sporadique. En effet, la myocardite parvovirale ne peut se développer que chez des chiots âgés de moins de 3-4 semaines, lorsque le syncytium myocardique est en multiplication active et donc sensible à la réplication du virus. Mais aujourd’hui, comme la majorité des femelles ont été vaccinées (ou exposées au virus) et qu’elles ont développé une forte réponse immunitaire, la quasi-totalité des chiots reçoivent des AOM qui les protègent de l’infection par le parvovirus pendant leurs premières semaines de vie.

La myocardite parvovirale est caractérisée par une mort subite des chiots infectés ; dans certaines conditions, la mort est précédée de signes digestifs et d’un court épisode de dyspnée, de cris et de haut-le-cœur. Certains animaux peuvent être cliniquement sains, le problème cardiaque n’étant détecté qu’à l’électrocardiogramme. Le virus prédispose ces chiens à une cardiopathie dégénérative, et une insuffisance cardiaque peut se développer des semaines voire des mois plus tard. Les chiots qui survivent à la myocardite parvovirale développent une fibrose myocardique. Les chiens qui meurent de la forme myocardique sont souvent en bon état général et parfois la seule anomalie macroscopique à l’autopsie est un œdème pulmonaire. Dans d’autres cas, le cœur montre une flaccidité pariétale et une dilatation des chambres, avec des zones pâles de nécrose en surface (Figure 4). A l’histologie, les lésions myocardiques incluent : myocardite non suppurée, infiltration multifocale de lymphocytes et de plasmocytes, et présence de corps d’inclusion intranucléaire 1 2.

Figure 4. Cœur d’un chien mort d’une myocardite parvovirale : notez la zone d’infarcissement.  © Nicola Decaro

Approche diagnostique

Le diagnostic de la parvovirose repose souvent simplement sur la présence d’une diarrhée sanguinolente nauséabonde, mais il faut souligner que d’autres agents pathogènes peuvent induire des signes similaires et que l’entérite parvovirale est fréquemment non hémorragique. Un diagnostic de laboratoire est donc toujours nécessaire pour confirmer ou exclure une parvovirose 1 2.

Diagnostic clinique

La présence de vomissements et de diarrhée hémorragique avec leucopénie aiguë associée est fortement évocatrice d’une parvovirose. Toutefois, les autres hypothèses diagnostiques incluent la maladie de Carré, l’hépatite de Rubarth, les parasitoses intestinales et d’autres troubles alimentaires. Le CCoV provoque habituellement une entérite non hémorragique, mais dans certaines conditions, il peut induire une diarrhée hémorragique, et des souches hypervirulentes (CCoV pantropique) ont été associées à une maladie systémique et à une leucopénie 13.

Diagnostic virologique

Une détection directe du virus peut être effectuée sur des selles de chiens malades ou des tissus prélevés post-mortem (intestin, rate, nœuds lymphatiques). Dans les stades avancés de l’infection, le sang est le prélèvement le plus fiable en raison de la virémie prolongée. Une publication a indiqué des titres élevés de virus dans tous les tissus, dont le cerveau, bien que les titres les plus élevés aient été atteints dans les tissus lymphoïdes 14.

Il existe plusieurs kits de test à réaliser à la clinique pour détecter le CPV dans les selles. Ces tests détectent (avec une efficacité égale) les trois variants antigéniques et même le FPV apparenté. Mais ils sont peu sensibles, donnant jusqu’à 50-60 % de résultats faux négatifs, surtout dans les stades avancés de l’infection, quand les quantités de virus excrété dans les selles sont faibles ou quand les titres élevés d’anticorps anti-CPV dans la lumière intestinale inhibent la production de virus viable 15 16. L’hémagglutination (HA) et l’isolement du virus ne peuvent être réalisés qu’en laboratoire spécialisé, et n’affichent pas une sensibilité significativement supérieure aux kits de test 17. A l’inverse, les méthodes de PCR qui détectent l’ADN viral sont très sensibles et doivent au moins être utilisées en cas de forte suspicion de parvovirose chez un chiot négatif avec un kit de dépistage 18. En outre, des tests PCR ont été développés pour faire la distinction entre les variants du CPV 19, ainsi qu’entre les virus vaccinaux et sauvages 20 21 22, ce qui peut être utile s’il y a polémique entre les propriétaires de chiens, les vétérinaires et les fabricants de vaccins quand une diarrhée apparaît dans les jours qui suivent une vaccination contre le CPV. En effet, les vaccins du marché contiennent des virus vivants modifiés qui se répliquent dans l’épithélium intestinal des chiens vaccinés. Le virus est ensuite excrété dans les selles (bien qu’en faibles quantités et peu longtemps par rapport aux souches sauvages 23) et cela peut conduire à la détection du CPV dans les selles des chiens vaccinés et à un faux diagnostic, quand les signes cliniques sont en réalité dus à d’autres agents entéropathogènes. En outre, les tests PCR sont utiles pour exclure l’hypothèse d’un retour à la virulence de virus vaccinal si un animal développe une gastroentérite aiguë peu de temps après la vaccination.

Diagnostic sérologique

Malgré l’existence de plusieurs tests, la sérologie n’a aucune valeur diagnostique. En effet, les anticorps sériques spécifiques peuvent ne pas être liés à une infection active par le CPV si le chien a été vacciné ou préalablement exposé au virus. Toutefois, les tests sérologiques sont utiles pour évaluer le statut immunologique d’un chien par rapport au CPV avant et après vaccination et, grâce à la détection de la baisse du taux d’AOM, pour calculer quand un chiot peut être vacciné sans interférence avec les AOM. Un test sérologique est également essentiel pour évaluer si un chien a répondu ou non à la vaccination. Le test sérologique le plus utilisé est le test d’inhibition de l’hémagglutination (IHA), qui nécessite du personnel et des substrats spécialisés, mais il n’y a que la neutralisation virale (NV) qui soit capable de détecter les anticorps protecteurs, et ce test a été largement utilisé pour évaluer la neutralisation croisée entre les virus vaccinaux et sauvages 1 12.


Approche thérapeutique

Bien qu’il soit symptomatique et non spécifique, le traitement est souvent bénéfique pour réduire la mortalité associée à la parvovirose. L’objectif principal du traitement de l’entérite parvovirale est de rétablir l’équilibre hydro-électrolytique et de prévenir les co-infections par des bactéries opportunistes. Une fluidothérapie intraveineuse avec un soluté de Ringer supplémenté en glucose et en potassium permet de corriger l’hypoglycémie et l’hypokaliémie. S’il n’est pas possible de contrôler régulièrement les taux d’électrolytes et de glucose, des solutés IV supplémentés empiriquement avec du chlorure de potassium (20-40 mEq/L) et du dextrose (2,5 %-5 %) conviendront. Des antiémétiques par voie parentérale (chlorpromazine, acépromazine, prochlorpérazine, métoclopramide, ondansétron, dolasétron et maropitant, par exemple) peuvent aider à réduire les pertes hydriques et la détresse de l’animal, facilitant ainsi sa nutrition entérale. Notons toutefois que les antagonistes alpha-adrénergiques peuvent aggraver l’hypotension chez les chiots en hypovolémie, tandis que les prokinétiques peuvent augmenter le risque d’intussusception. Les gastroprotecteurs et les anti-H2 (cimétidine, ranitidine) peuvent également se révéler bénéfiques. Des antibiotiques à large spectre doivent être administrés pour prévenir ou traiter les surinfections. L’association d’une pénicilline et d’un aminoglycoside est la meilleure option pour contrôler les infections bactériennes gram-négatives aérobies et anaérobies qui compliquent fréquemment la parvovirose canine. Les céphalosporines de troisième génération sont à préférer aux aminoglycosides néphrotoxiques chez les animaux dont la fonction rénale est altérée, et les quinolones sont à proscrire chez les chiens en croissance. Si les vomissements se sont calmés pendant 12-24 heures, il n’est pas recommandé de retirer l’eau et la nourriture chez les chiots malades car il est prouvé qu’ils se rétablissent plus vite en consommant un aliment hyperdigestible, préparé ou ménager 24. Les chiots anorexiques doivent recevoir une alimentation adaptée par sonde naso-œsophagienne ou naso-gastrique. Une transfusion de sang total ou de plasma peut aider à corriger les pertes sanguines et protéiques dues à l’entérite sévère 1 12. Aucun médicament spécifique n’a montré de réelle efficacité contre la parvovirose.

L’administration de plasma hyperimmun ou d’immunoglobulines purifiées peut être bénéfique en préventif chez les chiots en contact avec des animaux infectés, mais leur efficacité n’est pas démontrée chez les chiots malades. En effet, au moment où les signes cliniques apparaissent, le virus a colonisé les tissus cibles et les taux d’anticorps sont déjà élevés. Il a parfois été décrit que les molécules qui stimulent la production leucocytaire, comme le facteur de stimulation des colonies de granulocytes recombinant humain ou canin, raccourcissaient la durée d’hospitalisation et augmentaient les taux de survie, mais des études complémentaires sont nécessaires pour confirmer leur efficacité. Ces dernières années, l’efficacité de médicaments antiviraux a été évaluée : l’antigrippal oseltamivir pourrait être bénéfique mais d’autres études doivent être réalisées. Des recherches ont montré que l’interféron-ω recombinant félin permettait de réduire les signes cliniques et la mortalité seulement si le traitement était initié peu après l’infection 1, une condition non reproductible en pratique.


Mesures sanitaires

Malgré une excrétion fécale prolongée démontrée 23, le virus infectant a peu de chances d’être excrété pendant plus de 7 à 10 jours. Mais la résistance exceptionnelle du virus, due à l’absence d’enveloppe, fait qu’il est difficile à éradiquer de l’environnement et qu’il peut persister pendant plusieurs semaines voire plusieurs mois, propageant ainsi davantage l’infection. Un isolement strict des chiots touchés et une désinfection poussée sont obligatoires. Les matières fécales doivent être éliminées dès que possible, car elles sont la principale source de contamination environnementale. La plupart des désinfectants courants n’inactivent pas le CPV, mais l’efficacité des solutions d’hypochlorite de sodium à 5-10 % a été prouvée. Toutes les surfaces résistantes doivent être exposées pendant au moins 10 minutes à de l’eau de Javel diluée, notamment les boxes d’élevage et les cages d’hospitalisation très contaminés par les selles. Les surfaces qui ne résistent pas à l’eau de Javel doivent être nettoyées à la vapeur 1.
 


Vaccination

Interférence avec les AOM

Le principal problème de la vaccination contre la parvovirose est lié aux AOM qui protègent les chiots d’une infection par les souches sauvages mais qui interfèrent avec l’immunisation active. Les titres d’AOM dépendent des taux sériques d’anticorps de la mère et de la quantité de colostrum ingérée par les chiots. Ainsi, les chiots d’une même portée peuvent avoir des taux d’AOM différents et donc devenir sensibles à l’infection par le CPV (et à l’immunisation active) à des âges différents. La vaccination des chiots ayant des taux élevés d’AOM (titres IHA >1/20) peut entraîner un défaut de séroconversion dû à la destruction du virus vaccinal par les anticorps colostraux. Puisque seuls les titres IHA ≥ 1/80 sont jugés protecteurs contre l’infection par les souches sauvages, il existe une période – appelée trou immunitaire – de 2-3 semaines, généralement, pendant laquelle les chiots ne peuvent pas être vaccinés mais peuvent être infectés et développer la maladie.

Pour prévenir une interférence avec l’immunisation active, les vaccins ne doivent être administrés qu’après la baisse des taux d’AOM 1 2. Différentes stratégies ont été recommandées pour résoudre le problème de l’interférence avec les AOM, comme les vaccins à haut titre et la vaccination intranasale 25. Des administrations intranasales répétées de vaccins CPV monovalents se sont montrées efficaces pour éradiquer le virus dans des élevages infectés (observation personnelle). 

Selon les Lignes Directrices de la WSAVA (Association Mondiale Vétérinaire des Petits Animaux) 26, la primovaccination CPV ne doit pas être finalisée avant l’âge de 14-16 semaines pour garantir la protection de tous les chiots, même ceux chez qui les AOM persistent longtemps. Le protocole recommandé implique trois administrations de vaccin CPV au cours de la première année, avec un premier rappel à un an, puis des rappels tous les trois ans 1.

Vaccins CPV-2 et protection croisée avec les variants antigéniques

Si la fenêtre de sensibilité est la principale cause de circulation active du CPV chez les animaux vaccinés, il existe également des doutes quant à l’efficacité totale des vaccins de type 2 contre les nouveaux variants antigéniques 4 5 6. La majorité des vaccins existants sont préparés avec la souche CPV-2 originale qui ne circule plus sur le terrain, et des études ont montré que les anticorps produits en réponse au virus vaccinal ne neutralisent pas totalement les souches CPV sauvages actuelles. Il existe quelques vaccins enregistrés contenant le variant CPV-2b, et il serait souhaitable de disposer de formulations préparées avec le nouveau variant 2c, bien que les trois variants offrent une neutralisation croisée efficace 4.

References

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Nicola Decaro

Nicola Decaro

Nicola Decaro, Département de Médecine Vétérinaire, Université de Bari, Valenzano, Italie En savoir plus

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