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Numéro du magazine 30.2 Autre scientifique
Publié 12/11/2020
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La science a commencé à explorer les processus qui sous-tendent le vieillissement. Dans cet article, Nathalie Dowgray donne un bref aperçu de ce que nous savons actuellement et de ce que nous pourrions apprendre dans le futur, tant au sujet des animaux que des humains.
Chez l’Homme, le mot « gériatrique » a tendance à être utilisé lorsque les maladies liées à l’âge nuisent à la santé et au bien-être.
La médecine vétérinaire du futur se concentrera autant sur la qualité de vie que sur la longévité de nos animaux de compagnie.
Le vieillissement félin est mal connu mais il se déroule de manière similaire à celui des autres mammifères.
Dans l’avenir, les processus biologiques du vieillissement pourraient être influencés pour retarder l’apparition des maladies liées à l’âge.
Le vieillissement peut être défini comme un « déclin fonctionnel au cours du temps » et constitue un domaine de recherche relativement nouveau 1. L’espérance de vie moyenne augmente dans le monde mais cela est principalement dû à un phénomène démographique lié à la réduction de la mortalité à la naissance, à la diminution de la mortalité des jeunes enfants et au meilleur contrôle des maladies infectieuses. Dans de nombreux pays, l’espérance de vie moyenne dépasse maintenant 60 ans et elle est encore plus longue dans les pays riches (souvent supérieure à 80 ans), grâce à l’amélioration du traitement des maladies autrefois mortelles et de la gestion des maladies chroniques. Toutefois, une durée de vie plus longue ne signifie pas toujours qu’elle est accompagnée d’une bonne qualité de vie. Pour les professionnels de la santé, le défi consiste à aider les gens à vivre non seulement plus longtemps, mais aussi sans maladies chroniques et débilitantes. Ces facteurs n’affectent en effet pas seulement la qualité de vie des gens : ils ont aussi un impact économique important lié à la perte de membres productifs dans la société et au coût des soins des personnes malades.
La même situation existe probablement chez nos animaux de compagnie : amélioration de la nutrition, vaccinations, gestion de la reproduction, meilleur diagnostic et traitement des maladies ont fait augmenter l’espérance de vie des chiens et des chats bien que des comparaisons soient difficiles à faire car on ne dispose pas de données anciennes sur la longévité 2 3. Des études britanniques récentes ont estimé l’espérance de vie moyenne des chats à 14 ans 3 et celle des chiens à 12 ans 2 mais dans quelques cas, les chats peuvent vivre jusqu’à 30 ans 1, et même parfois encore plus longtemps (selon des sources non vérifiées). Cependant, comme chez l’Homme, on constate également une augmentation des maladies chroniques associées à l’âge chez les animaux. Par conséquent, tout en continuant à se concentrer sur les maladies, la profession vétérinaire devrait maintenant davantage tenir compte de la biologie du vieillissement afin d’améliorer durée et qualité de vie chez les animaux de compagnie.
1 AnAge database ; voir : https://genomics.senescence.info/species
Les signes physiques du vieillissement peuvent être observés tant chez l’Homme que chez les animaux (Figure 1). Chez l’Homme, elles incluent des altérations cutanées (fortement dépendantes du mode de vie), des modifications du système musculo-squelettique (comme la perte de masse musculaire et de force) et diverses affections, dont l’ostéoporose (entraînant une réduction de la taille et une courbure vertébrale) et l’arthrose (qui réduit la mobilité).
En outre, on observe une diminution de certains sens, le plus souvent la vision et l’audition, ainsi qu’un déclin cognitif. Parmi les maladies liées à l’âge, on trouve des maladies cardiovasculaires (dont l’hypertension), une neurodégénérescence ainsi que le cancer.
Chez les chats, des changements physiques sont également associés à l’âge (Figure 2a) (Figure 2b), notamment des altérations du système tégumentaire qui modifient la couleur et l’état du pelage 4. L’arthrose féline perturbe la mobilité et les comportements de toilettage 5 ; des altérations sensorielles se produisent également, ainsi qu’un déclin cognitif 6. Parmi les maladies liées à l’âge chez le chat, il faut inclure la maladie rénale chronique (MRC), l’hyperthyroïdie, les maladies cardiovasculaires (y compris l’hypertension), l’arthrose, le diabète et le cancer 6. Selon une étude britannique, les cinq principales causes de mortalité chez les chats de plus de 5 ans sont la MRC (13,6 %), les maladies non spécifiques (12,6 %), le cancer (12,3 %), le développement de masses anormales (11,6 %) et les troubles neurologiques (7,8 %) 3. Dans cette étude, aucune cause spécifique n’était attribuée aux masses anormales et des tumeurs non diagnostiquées étaient probablement souvent présentes. Le cancer et les maladies rénales seraient donc les causes les plus importantes de mortalité chez les chats âgés. L’âge médian des chats morts de maladie non précisée était de 16 ans ; ces décès sont sans doute imputables à l’association de comorbidités et d’une fragilité accrue liée au vieillissement, pouvant compliquer la détermination du processus pathologique primaire pour les vétérinaires et rendre les propriétaires réticents à approfondir le diagnostic.
Quand le vieillissement commence-t-il ?
Le moment exact où le vieillissement commence est mal défini ; chez l’Homme, des changements liés à l’âge se produisent à différents moments dans différents tissus. On en sait encore moins à propos du chat mais un consensus actuel fait démarrer le processus de vieillissement vers l’âge de 7 ans 4 7. Des données sur les chats d’intérieur aux États-Unis suggèrent qu’à cet âge, la période de reproduction est terminée, le niveau d’activité est réduit et des changements métaboliques se produisent qui font augmenter le poids et la masse grasse 7. La prévalence de nombreuses maladies chroniques augmente également après l’âge de 9 ans 6.
Il est important de noter que le vieillissement a lieu chez tous les individus mais que les maladies liées à l’âge n’affectent que certains animaux. Le terme « gériatrique » tend maintenant à être utilisé quand les changements et les maladies liés à l’âge compromettent la santé et le bien-être d’un individu ; ce terme fait peu référence à l’offre de soins de santé pour la population âgée en général. Ce changement de terminologie devrait également concerner les patients des vétérinaires, étant donné le nombre croissant d’animaux âgés en bonne santé qui ne souffrent pas de maladies liées à l’âge (Figure 3).
Des processus biologiques et biochimiques complexes sous-tendent les signes physiques du vieillissement. Les domaines couverts par la biologie du vieillissement sont vastes : des recherches sont en cours sur le vieillissement cellulaire, systémique (en utilisant des modèles animaux de vieillissement) et populationnel (à partir de l’étude de cohortes humaines). L’objectif général est de comprendre le processus de vieillissement et d’identifier les domaines dans lesquels il serait possible d’agir pour accroître la longévité. Si certaines interventions peuvent ralentir le vieillissement, on sait que cela permettra également de ralentir le développement des maladies liées à l’âge, améliorant ainsi la durée de vie en bonne santé.
Ces dernières années, des modèles canins de vieillissement ont suscité beaucoup d’intérêt et les arguments qui montrent qu’ils constituent un bon modèle naturel du vieillissement chez l’Homme sont, dans une certaine mesure, également applicables aux chats 8. Contrairement aux chiens, la race modifie cependant peu l’espérance de vie, même si celle-ci varie considérablement entre les chats errants et les chats de compagnie à cause du risque de maladies infectieuses et de mort accidentelle chez les premiers. En effet, comme indiqué ci-dessus, le chat a une espérance de vie maximale supérieure à celle du chien (30 ans, contre 24 ans 1) bien que la durée de vie moyenne semble similaire, soit 14 ans chez le chat et 12 ans chez le chien 2 3.
1 AnAge database ; voir : https://genomics.senescence.info/species
Le processus de vieillissement fragilise l’organisme et augmente sa réceptivité aux maladies tout en diminuant sa résilience, ce qui réduit sa capacité à supporter le stress concomitant. On le constate couramment chez les chats vieillissants, chez qui les maladies concomitantes influencent bien plus la qualité de vie que chez un chat plus jeune. L’étude du processus de vieillissement pourrait permettre d’identifier les moments critiques où une intervention, ou un dépistage spécifique, pourraient être particulièrement bénéfiques pour l’individu.
De nombreux marqueurs du vieillissement ont été identifiés (Encadré 1). Pour être un marqueur du vieillissement, ce facteur doit répondre aux critères suivants 1 :
Étant donné que de nombreux facteurs sont reliés, ils peuvent difficilement satisfaire à ces critères mais, pour les besoins de la discussion, nous les examinerons séparément et nous verrons également comment ils s’appliquent à la fois au vieillissement du chat et aux maladies félines liées à l’âge.
Le premier marqueur du vieillissement, c’est l’accumulation de lésions génétiques provoquées par l’exposition à des facteurs exogènes et endogènes. Le vieillissement est associé à une augmentation des lésions cellulaires, et aussi à une diminution des processus de réparation, les dommages affectant l’ADN nucléaire et mitochondrial ainsi que l’architecture nucléaire 1. Chez le chat, la principale conséquence de ce phénomène est probablement le risque accru de cancer avec l’âge 3 ; comme c’est souvent le cas chez l’Homme, il a été montré que les lignées tumorales du chat présentent une instabilité génétique accrue.
Les tumeurs thyroïdiennes sont des formes très fréquentes de cancer chez le chat ; elles entraînent une hyperthyroïdie et affectent jusqu’à 8,7 % des chats de plus de 10 ans ; cependant, la plupart des vétérinaires ne considéreraient pas cette affection comme un « cancer » (Figure 4) (Figure 5). L’hyperthyroïdie féline est principalement due à un adénome fonctionnel de la glande thyroïde et ressemble à la maladie de Plummer chez l’Homme. Moins fréquemment, elle peut être due à un carcinome thyroïdien, bien qu’on n’ait pas rapporté chez le chat la présence d’auto-anticorps thyroïdiens, comme cela est le cas chez certains patients souffrant de la maladie de Graves, la forme la plus courante d’hyperthyroïdie humaine.
L’étiopathogénèse de l’hyperthyroïdie féline est complexe et multifactorielle. La qualité de l’environnement joue probablement un rôle dans le développement de la maladie 9 et, bien que le rôle de l’alimentation reste à clarifier 10, des changements dans l’expression génétique ont été identifiés et seraient à incriminer. Par exemple, une surexpression de la protéine c-RAS a été notée chez des chats hyperthyroïdiens présentant un adénome 11, ainsi que des mutations du gène Gsα 12. Des mutations somatiques du gène codant pour le récepteur de la TSH ont également été identifiées chez les chats affectés 13.
Ce facteur satisfait à tous les critères d’un marqueur du vieillissement. Les télomères sont des structures protectrices qui « recouvrent » les extrémités des chromosomes et aident à maintenir la stabilité génétique. Toutefois, ils se raccourcissent lors de chaque réplication chromosomique et, en raison de leur importance, ils sont considérés comme des marqueurs séparés du vieillissement (Figure 6) 1. Les cellules somatiques des mammifères contiennent une faible quantité (ou pas du tout) de télomérase, une ribonucléoprotéine capable de réparer les télomères ; cela signifie que les télomères sont peu capables de se réparer naturellement, ce qui peut entraîner des lésions persistantes de l’ADN. Comme les télomères raccourcissent avec l’âge, ils finissent par atteindre une taille critique, l’organisme les repère comme de l’ADN endommagé et cela déclenche la sénescence et/ou l’apoptose des cellules. Des recherches félines spécifiques ont montré que le raccourcissement des télomères se produit lors de MRC et avec l’âge dans les cellules sanguines ; l’expression de la télomérase augmente aussi dans certaines tumeurs, permettant sans doute aux cellules tumorales de proliférer sans être détectées.
Une altération épigénétique est définie comme un changement héréditaire qui n’affecte pas la séquence chromosomique mais qui altère l’expression des gènes. Trois types différents sont reconnus :
Dans l’avenir, le fait de pouvoir contrôler les altérations épigénétiques pourrait ouvrir la voie à des manipulations génétiques susceptibles d’améliorer l’espérance de vie et surtout d’aider à maintenir les fonctions et à réduire la fragilité, améliorant ainsi la durée de vie en bonne santé.
Nathalie J. Dowgray
La protéostase est la capacité de stabiliser correctement les protéines repliées ; elle implique des mécanismes de pliage des protéines dépliées et de nettoyage par dégradation ou autophagie. La protéostase est altérée lors du vieillissement et chez l’Homme, l’expression chronique de protéines non repliées, mal repliées ou agrégées est associée à certaines maladies liées à l’âge 1. Des plaques d’amyloïde β ont été trouvées chez des chats âgés présentant un dysfonctionnement cognitif et la phosphorylation tau est associée à des crises d’épilepsie chez les chats vieillissants. La mortalité féline due à des troubles comportementaux et neurologiques est respectivement estimée à 1,3 % (âge médian de 16 ans) et 7 % (âge médian de 15,1 ans) 2, bien que la néoplasie puisse être un facteur contributif dans certains cas. L’amyloïde pancréatique est associée au diabète félin, tandis que l’amylose est assez souvent observée à l’autopsie chez les chats atteints de MRC. La manipulation expérimentale de l’autophagie favorise la longévité et des recherches sont en cours sur l’effet de la rapamycine sur le vieillissement canin, car cette molécule possède des propriétés immunosuppressives et antiprolifératives dans les cellules des mammifères 17.
Une cellule est normalement capable de reconnaître des nutriments et d’utiliser des substrats énergétiques (tels que le glucose) mais le vieillissement pourrait altérer la capacité de détection des nutriments. Par exemple, les voies de l’insuline et du facteur de croissance analogue à l’insuline 1 (IGF-1) ont été bien conservées tout au long de l’évolution ; les manipulations de ces voies (ainsi que certaines cibles) ont été reliées à la longévité. Plus généralement, on sait que la restriction calorique augmente l’espérance de vie dans de nombreuses espèces, grâce à l’activation de cette voie ainsi que d’autres protéines clés associées, qui forment des systèmes de détection des nutriments. Des recherches en cours sur le chien examinent l’intérêt potentiel de médicaments tels que la rapamycine qui imitent les effets de la restriction alimentaire en supprimant une voie de détection des nutriments ; l’effet d’une restriction calorique sur ces voies n’a pas encore été étudié chez le chat. Cependant, une baisse du taux sérique d’IGF-1 a été signalée chez les chats âgés 18, et une baisse de l’hormone de croissance (GH) et de l’IGF-1 est associée au vieillissement normal dans d’autres espèces. Il pourrait s’agir d’un mécanisme de défense : produisant moins de GH et d’IGF-1, l’organisme tenterait de prolonger sa durée de vie en réduisant la croissance cellulaire, le métabolisme et le taux de lésions cellulaires. Une baisse de la GH et de l’IGF-1 a également été signalée dans des cas de vieillissement prématuré en laboratoire, à tel point que dans certains cas, ces mesures de défense peuvent éventuellement aggraver le vieillissement. La baisse du taux d’IGF-1 chez les chats âgés a été étudiée pour voir si cela avait un impact sur l’homéostasie des lymphocytes (car la baisse du nombre de cellules T est associée à l’immunosénescence) mais aucun effet direct sur les lymphocytes périphériques n’a encore été mis en évidence 18. Une augmentation pathologique du taux d’IGF-1 sérique, secondaire à une sécrétion accrue de GH, a été décrite chez des chats atteints d’acromégalie liée à une tumeur de l’hypophyse. Sans traitement, elle entraîne une augmentation de la croissance et du métabolisme cellulaire qui affecte l’espérance de vie car les chats affectés souffrent de diabète sucré insulino-résistant ; ils décèdent généralement d’une insuffisance cardiaque congestive, d’une MRC ou de signes induits par le développement d’une masse dans l’hypophyse.
L’obésité est désormais un problème majeur chez nos animaux de compagnie et elle a de multiples effets métaboliques (Figure 7) ; bien que cela reste à explorer, il est probable que l’obésité réduise la durée de vie d’un chat, en partie à cause de la dérégulation de ces voies de détection des nutriments. Chez le chat, une espérance de vie raccourcie a été associée à une note d’état coporel (NEC) à la fois faible (soit 9) et très élevé 19.
Il a été montré que le dysfonctionnement mitochondrial accélérait le vieillissement chez les mammifères. On pensait auparavant que les dérivés réactifs de l’oxygène (Reactive Oxygen Species ou ROS : substances chimiquement réactives contenant de l’oxygène) perturbaient le fonctionnement mitochondrial par l’intermédiaire des radicaux libres mais les ROS sont maintenant considérés comme des signaux qui aident à maintenir l’homéostasie cellulaire, même si, une fois un certain seuil dépassé, ils pourraient aggraver les lésions liées à l’âge 1. Une étude de 2013 20 indiquait que les chats mâles pourraient présenter un risque oxydatif plus important que les femelles, mais la signification de ces résultats sur le vieillissement n’est pas claire, la réflexion au sujet des ROS ayant évolué depuis la publication de cet article. Chez l’Homme, l’entraînement à l’endurance et le jeûne intermittent favorisent la longévité en diminuant la dégénérescence mitochondriale, tandis que les télomères et les sirtuines auraient également un rôle protecteur 1.
La sénescence cellulaire est l’arrêt durable du cycle cellulaire couplé à des changements phénotypiques stéréotypée ; elle peut être déclenchée par le raccourcissement des télomères et d’autres stimuli liés à l’âge 1. La sénescence ne se produit pas dans tous les tissus âgés ; l’accumulation de cellules sénescentes dans les tissus peut être due à une augmentation de la production de ces cellules ou (à cause d’une réponse immunitaire éventuellement altérée) à une diminution de la clairance 1. La sénescence serait un processus naturel bénéfique visant à éliminer les cellules lésées et potentiellement oncogènes ; une réduction de la clairance et du remplacement de ces cellules sénescentes au fur et à mesure que les tissus vieillissent pourrait cependant contribuer au processus de vieillissement 1. Les cellules sénescentes possèdent également un sécrétome pro-inflammatoire (un ensemble de protéines synthétisées par un organisme et sécrétées dans l’espace extracellulaire) qui pourrait contribuer au vieillissement. En plus du raccourcissement des télomères dans le tissu rénal des chats atteints de MRC, une étude a noté une concentration accrue de cellules sénescentes colorées par la β-galactosidase, bien que cela n’ait pas atteint la signification statistique 21. En outre, il est prouvé que la sénescence cellulaire pourrait être associée à la réponse inflammatoire chronique et à la fibrose qui mènent à la MRC féline. La sénescence peut entraîner une diminution du potentiel de prolifération des cellules épithéliales des tubules rénaux, contribuant (avec l’effet du raccourcissement des télomères) au développement de la MRC 22.
L’épuisement des cellules souches réduit l’ensemble des processus de régénération tissulaire, non seulement par manque de cellules saines de remplacement, mais aussi en raison de la réduction de « l’immuno-sénescence », un processus immunologique de l’organisme qui élimine les tissus sénescents ou endommagés 1. On pense que cela résulte d’une réduction de l’hématopoïèse, entraînant une anémie, d’un risque accru de malignité myéloïde et d’une chute des cellules immunitaires adaptatives 1. Des études ont montré une baisse des cellules T, des cellules B et des cellules tueuses naturelles (NK) chez les chats âgés (10-14 ans) par rapport aux chats plus jeunes (2-5 ans) 23. Bien que ces changements immunitaires ne semblent pas modifier la sensibilité aux infections si une forte réponse immunitaire s’est développée chez le jeune adulte, ils influencent la production d’anticorps lors d’une nouvelle vaccination. Une synthèse des recherches sur le vieillissement immunitaire des félins a été publiée en 2010 mais aucune étude féline spécifique n’a été rapportée dans ce domaine depuis 24.
Le vieillissement affecte aussi la façon dont les cellules communiquent entre elles, qu’elles soient d’origine endocrine, neuro-endocrine ou neuronale. Globalement, le vieillissement entraîne une dysrégulation des signaux neuro-hormonaux, une augmentation des réactions inflammatoires, des modifications de l’environnement péricellulaire et extracellulaire, et une diminution de l’immuno-surveillance, ce qui augmente le risque d’agents pathogènes et les transformations cellulaires malignes 1. Les modifications de la communication intracellulaire sont également susceptibles de jouer un rôle dans la progression de la fibrose rénale dans la MRC féline 22. L’état pro-inflammatoire au cours du vieillissement est souvent nommé « inflammaging » et il résulte de l’accumulation des nombreux facteurs déjà discutés 1.
La recherche sur ces différents facteurs produira peut-être de nouveaux moyens d’agir contre le vieillissement avant que des signes n’apparaissent mais, d’après les connaissances actuelles, le message le plus important pour les vétérinaires est en fait très simple : le maintien d’une condition physique optimale chez les chats est susceptible d’améliorer à la fois la longévité et la qualité de vie. Des études montrent que les chats dont la note d’état corporel (NEC) est supérieure à 6/9 courent un risque accru de contracter diverses maladies 25, bien que seul un indice de 9/9 ait été associé à une durée de vie réduite 19. Par conséquent, pour optimiser la santé et la longévité, maintenir la NEC entre 5 et 6 est susceptible de donner de bons résultats.
Dans l’avenir, nous pouvons émettre l’hypothèse que des aliments, des nutraceutiques ou des traitements seront mis au point, qui pourront être donnés à l’âge adulte (ou dès que des changements liés à l’âge seront détectés) afin d’aider à maintenir la santé. Les mécanismes encourageant la réparation de l’ADN, allongeant les télomères (ou empêchant leur raccourcissement), augmentant l’autophagie, améliorant l’élimination des cellules sénescentes et augmentant la production de cellules souches (ce qui favorise la production de populations de cellules saines) auront tous un effet en cascade pour allonger l’espérance de vie en bonne santé de nos animaux de compagnie. Bien que la « fontaine de jouvence » ne soit qu’un concept mythique, il est réaliste d’espérer que certaines interventions permettront d’agir sur nombre de ces mécanismes. Pour ce qui concerne les chats, la fonction rénale pourrait être un objectif important, étant donné la prévalence de la MRC. Cependant, puisque tous ces processus sont reliés, une substance qui a un effet positif sur un tissu pourrait avoir un effet négatif sur d’autres facteurs, d’où la nécessité de poursuivre les recherches.
Nathalie J. Dowgray
Diplômée de l'Université Massey en Nouvelle-Zélande depuis 2002, le Dr Dowgray a travaillé pour des refuges félins ainsi qu’en clientèle pour petits animaux, En savoir plus
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