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Veterinary Focus

Numéro du magazine 32.2 Cardiologie

Les biomarqueurs cardiaques chez le chat

Publié 20/10/2022

Ecrit par Clémence Peyron et Fanny Bernardin

Aussi disponible en Deutsch , Italiano , Română , Español et English

Des études récentes ont permis d’identifier des biomarqueurs qui peuvent aider à diagnostiquer des maladies cardiaques félines. Cet article présente l’utilisation et les limites de ces tests, notamment le NT-proBNP et la troponine I.

Le dosage du TnI peut aider à savoir si la cause d’une dyspnée chez un chat est ou non d’origine cardiaque

Points clés

Le NT-proBNP est un marqueur d’étirement du muscle cardiaque et de la surcharge volumique. Comme il reflète la fonction myocardique, il peut aider au diagnostic de certaines cardiomyopathies.


La troponine I (TnI) est un marqueur de lésion myocardique, notamment ischémique, et son dosage permet d’affiner le pronostic des cardiopathies car sa concentration sérique est étroitement associée au risque de décès.


Les tests rapides qualitatifs NT-proBNP permettent d’obtenir des résultats au chevet du patient dans un contexte de détresse respiratoire. Ils peuvent aider à identifier ou à exclure rapidement une cause de dyspnée d’origine cardiaque. 


Le dosage de ces deux biomarqueurs apporte des informations supplémentaires au clinicien mais ne remplace en aucun cas l’imagerie et les autres examens complémentaires.


Introduction

En médecine féline, et plus particulièrement en cardiologie, le NT-proBNP et la troponine I sont fréquemment cités comme des examens complémentaires auxquels le clinicien peut se référer afin d’explorer la fonction cardiaque ou de rechercher d’éventuelles lésions myocardiques. Maintenant que les dosages de ces deux biomarqueurs sont largement accessibles, plusieurs questions se posent :

  • Quand les mesurer ?
  • Lequel choisir et pourquoi ?
  • Comment les associer avec d’autres examens, tels que l’imagerie thoracique ?
  • Comment les interpréter ?

 

Biomarqueurs cardiaques

Un biomarqueur est une substance dont le dosage permet d’explorer une maladie spécifique (ici, cardiaque). Le biomarqueur idéal est utilisable pour le dépistage, le diagnostic, le pronostic et le suivi des différentes cardiomyopathies 1. S’il présente une très bonne sensibilité (soit très peu de faux négatifs), il permet un dépistage précoce. La spécificité (le moins possible de faux positifs) est également importante afin d’obtenir une fiabilité maximale 2.

La troponine I

Les troponines sont des protéines impliquées dans la contraction et la relaxation des muscles cardiaque et squelettiques. Elles sont localisées dans les myofibrilles, avec l’actine et la myosine, et existent sous différents isotypes (I, T, C) selon le muscle concerné (Figure 1). La troponine I (TnI) n’est présente que dans le muscle cardiaque, ce qui lui confère une spécificité de 100 %. Elle est considérée comme un marqueur de lésion ischémique dans le myocarde. La concentration plasmatique en TnI augmente dans les heures qui suivent l’apparition de la lésion, elle atteint un pic le premier jour et sa valeur peut rester élevée durant une semaine 3,4.

Conformation des différentes protéines

Figure 1. Conformation des différentes protéines (actine, myosine, tropomyosine et troponines I, T et C) à l’origine du mouvement de coulissement des filaments à l’intérieur des sarcomères des cardiomyocytes.
Crédit : Clémence Peyron/redessiné par Sandrine Fontègne

Le NT-proBNP

Les peptides natriurétiques (NP) sont une famille d’hormones dont le rôle est de réguler le volume intravasculaire et de contrôler la pression artérielle. Ils sont sécrétés par les cardiomyocytes, en réponse à un étirement anormal de ces derniers et à une surcharge en volume ou en pression ; ils sont également produits par d’autres tissus. Leur effet principal est de compenser l’action du système rénine-angiotensine-aldostérone, hyperactif en cas de cardiomyopathie et à l’origine du remodelage cardiaque. Comme leur nom l’indique, les NP entraînent une natriurèse et ils influencent également la diurèse, la vasodilatation, la diastole et la perméabilité vasculaire ; ils inhibent aussi la multiplication des cellules des muscles lisses.

Le brain natriuretic peptide (BNP) a été d’abord isolé dans le cerveau du porc mais il est également sécrété par les ventricules cardiaques. Dans un contexte pathologique, sa concentration sérique augmente et il est donc considéré comme un marqueur de la fonction cardiaque. Le BNP est d’abord sécrété sous forme d’un précurseur moléculaire, lequel est clivé par les protéases sériques pour former le C-BNP, la forme active, et le NT-proBNP, la forme inactive. Le C-BNP a une demi-vie très courte (90 secondes) et le dosage du NT-proBNP est donc préféré car il est plus stable lors du prélèvement et de la conservation 2 et sa demi-vie est plus longue (environ 120 minutes).

Les biomarqueurs et les cardiomyopathies félines

Le terme de cardiomyopathie désigne un trouble myocardique caractérisé par une ou plusieurs anomalies structurelles ou fonctionnelles du muscle cardiaque. Chez le chat, la cardiomyopathie le plus fréquemment décrite est la cardiomyopathie hypertrophique (CMH). C’est cette affection qui est le plus souvent citée dans la littérature et les études faites sur le rôle des biomarqueurs dans les maladies cardiaques. Leur rôle dans d’autres formes de cardiomyopathies (telles que la cardiomyopathie restrictive, dilatée ou non spécifique) a jusqu’ici été beaucoup moins étudié 5.

L’exploration des cardiomyopathies implique d’effectuer plusieurs examens complémentaires plus ou moins réalisables tels que l’échocardiographie et l’électrocardiographie. Parmi les tests réalisables en pratique généraliste, il faut citer le dosage du NT-proBNP et de la TnI, les radiographies thoraciques et la mesure de la pression artérielle systémique.

La prise en charge du chat et la hiérarchisation des examens complémentaires dépendront de chaque cas (du simple dépistage d’une maladie cardiaque au chat en détresse respiratoire). Il est important de savoir que les indications du dosage du NT-proBNP et de la TnI se chevauchent parfois, et il faut donc connaître la signification de chacun afin de cibler au mieux l’approche diagnostique (Tableau 1).

Tableau 1. Résumé des différentes indications du NT-proBNP et de la troponine I chez le chat.

Dosage quantitatif du NT-proBNP
Dosage qualitatif du NT-proBNP (test SNAP® rapide)
Troponine I
  • Distinguer une dyspnée féline d’origine cardiaque ou non cardiaque (+/– épanchement pleural) à partir du plasma ou d’un épanchement pleural.
  • Distinguer un chat atteint d’une cardiomyopathie subclinique d’un chat sain : à envisager si l’échocardiographie n’est pas réalisable. Des examens complémentaires sont justifiés si le résultat est anormal. N’exclut pas une cardiomyopathie si le résultat est dans les valeurs usuelles.
  • Distinguer un chat atteint d’une CMH occulte d’un chat sain. 
  • Distinguer une CMH obstructive d’une CMH non obstructive.
  • Distinguer un chat à MRC, hypertendu, avec une CMH, d’un chat atteint de MRC sans hypertension.
  • Distinguer un chat atteint de MRC à un stade avancé d’un chat à MRC débutante ou modérée.
  • Distinguer une dyspnée féline d’origine cardiaque ou non cardiaque (+/– épanchement pleural) à partir du plasma ou d’un épanchement pleural, de préférence dilué.
  • Distinguer un chat atteint d’une cardiomyopathie subclinique avancée d’un chat sain ou d’un chat atteint de cardiomyopathie subclinique modérée. La sensibilité est meilleure en présence d’un souffle cardiaque. Des examens complémentaires sont justifiés si le résultat est anormal. N’exclut pas une cardiomyopathie si le résultat est dans les valeurs usuelles.
  • Distinguer une dyspnée féline d’origine cardiaque ou non cardiaque (+/– épanchement pleural).
  • Valeur pronostique – associée au risque de mort d’origine cardiaque.
  • Distinguer un chat atteint de CMH d’un chat sain (dépistage).
  • Aide à évaluer la gravité de l’état du chat ; le niveau augmente avec la sévérité de la CMH (chat sain < chat à CMH subclinique < chat à CMH avancée < chat à CMH et thrombo-embolie).
  • Distinguer un chat atteint d’une CMH compensée d’un chat atteint d’une CMH décompensée.

 

Les biomarqueurs chez le chat en détresse respiratoire

Il est intéressant de pouvoir déterminer rapidement si la cause de la détresse respiratoire est d’origine cardiaque ou non, tout en évitant de manipuler intempestivement le chat, souvent instable. Avant d’effectuer un prélèvement sanguin, la question de la faisabilité et du rapport bénéfice/risque doit se poser (Figure 2). Cependant, si la réalisation de radiographies thoraciques n’est pas possible parce que le chat est trop instable, un test NT-proBNP au chevet du patient (ex : SNAP® Feline proBNP) peut être envisagé (Figure 3), associé si possible à une échographie thoracique. Si le test est négatif, il est fort probable que la dyspnée ne soit pas d’origine cardiaque 5.

Il peut être essentiel de stabiliser un chat cardiaque avant d’envisager des examens complémentaires

Figure 2. Il peut être essentiel de stabiliser un chat cardiaque avant d’envisager des examens complémentaires, notamment en cas de détresse respiratoire ; cela implique de le manipuler le moins possible et de le placer dans une cage à oxygène. 
Crédit : Fanny Bernardin

Les études menées sur des chats présentés en détresse respiratoire avec épanchement pleural ont montré que la sensibilité du test SNAP® Feline proBNP pour mettre en évidence une dyspnée due à une insuffisance cardiaque congestive (ICC) était de 93,9 à 100 % et la spécificité de 72,2 à 87,5 %, en effectuant l’analyse sur un prélèvement sanguin 6,7,8. Le test a également été réalisé sur des animaux avec un épanchement pleural : la sensibilité est très bonne (peu de faux négatifs) mais la spécificité est faible, à cause d’un trop grand nombre de faux positifs 6. Une autre étude a obtenu des résultats plus probants en diluant l’épanchement pleural de moitié avec un soluté NaCl à 0,9 % : la sensibilité finale était de 100 % et la spécificité était aussi nettement meilleure, à 85,7 % 8. Il faut cependant noter que l’utilisation du SNAP® Feline ProBNP n’est validée officiellement que sur sérum ou plasma EDTA.

Le test SNAP® Feline proBNP utilise une technique Elisa

Figure 3. Le test SNAP® Feline proBNP utilise une technique Elisa (enzyme-linked immunosorbent assay) pour détecter des niveaux normaux ou anormalement élevés de proBNP dans le sérum ou le plasma EDTA. Un système de flux bidirectionnel améliore la sensibilité (puisque l’échantillon a deux fois l’occasion de se fixer aux anticorps) et une étape de lavage accroît la spécificité en éliminant les déchets de la fenêtre de résultat. Le kit de test doit être conservé au réfrigérateur mais tous les composants du test doivent rester 30 minutes à température ambiante avant utilisation. Le résultat peut être lu 10 minutes après la fin de la procédure. 
Crédit : Laboratoire Idexx

Le principal défaut du dosage quantitatif du NT-proBNP est lié au délai nécessaire pour envoyer le prélèvement au laboratoire et recevoir les résultats, ce qui limite l’utilisation du test en situation d’urgence. Néanmoins, ce test permet une distinction fiable entre une détresse respiratoire d’origine cardiaque ou non cardiaque 5. Les différentes études menées sur le sujet indiquent une sensibilité de 86,4 à 100 % et la spécificité va de 82,4 à 88,9 % à partir d’un prélèvement sanguin. Si le test est effectué à partir d’un épanchement pleural non dilué, la sensibilité est toujours de 100 % (aucun faux négatif) et la spécificité varie de 76,5 à 94,4 %, selon la valeur seuil utilisée 7,8,9.

Le dosage de la TnI peut aussi aider à savoir si la détresse respiratoire d’un chat est ou non d’origine cardiaque (Figure 4). En effet, les concentrations sanguines en TnI sont significativement plus élevées chez les chats dyspnéiques atteints d’une cardiomyopathie que chez les chats sains ou les chats dont la dyspnée n’est pas d’origine cardiaque 5,10. Cependant, comme pour le dosage quantitatif du NT-proBNP, cette analyse est le plus souvent réalisée au laboratoire et l’attente des résultats implique un délai qui peut ralentir la démarche diagnostique alors que le chat nécessite des soins urgents.

Le dosage du TnI peut aider à savoir si la cause d’une dyspnée chez un chat est ou non d’origine cardiaque

Figure 4. Le dosage du TnI peut aider à savoir si la cause d’une dyspnée chez un chat est ou non d’origine cardiaque. 
Crédit : Shutterstock

Les biomarqueurs lors de suspicion de cardiomyopathie subclinique

Une cardiomyopathie subclinique est une cardiomyopathie qui n’entraîne pas de signes cliniques détectables chez le patient. Il faut en effet se rappeler qu’une cardiomyopathie à un stade très avancé peut parfois exister chez un chat bien avant que les signes cliniques s’expriment, et qu’un chat affecté peut rester asymptomatique très longtemps avant de décompenser brutalement. La plupart du temps, c’est l’apparition d’une détresse respiratoire qui motive la consultation et les investigations. Chez les chats à risque ou en cas de doute à l’auscultation, la détection précoce d’une cardiomyopathie permet pourtant de mettre en place un traitement adapté et de retarder la survenue de la décompensation. Dans cette perspective, les techniques non invasives et réalisables en pratique généraliste sont très utiles, au premier rang desquelles figure le dosage des biomarqueurs tels que le NT-proBNP ou la TnI.

Les tests rapides au chevet du patient ont moins d’intérêt quand il s’agit seulement de savoir si le chat peut être considéré comme en bonne santé ou atteint d’une cardiomyopathie subclinique, dans la mesure où la situation n’est pas qualifiée d’urgente. Dans un contexte subclinique, ces tests sont surtout intéressants parce qu’ils aident à distinguer les chats atteints d’une cardiomyopathie avancée des chats sains ou atteints d’une cardiomyopathie modérée 5. Dans une étude faite sur des chats apparemment sains, venus pour un dépistage, la sensibilité du test SNAP® Feline proBNP était de 43 % (beaucoup de faux négatifs) et la spécificité de 96 % (peu de faux positifs). La sensibilité est passée à 71 % et la spécificité à 92 % lorsque seuls les chats non symptomatiques mais présentant un souffle cardiaque ont été inclus. Ces observations étayent l’hypothèse qu’un test SNAP® positif a de fortes chances d’être associé à une cardiomyopathie, justifiant la réalisation d’examens complémentaires tels qu’une échocardiographie. En revanche, un test SNAP® négatif n’exclut pas la présence d’une cardiomyopathie 11.

Clémence Peyron

Si le test SNAP® est négatif, il est fort probable que la dyspnée ne soit pas d’origine cardiaque.

Clémence Peyron

Faire un dosage quantitatif du NT-proBNP est intéressant pour explorer une cardiomyopathie potentielle, notamment lorsque l’échocardiographie n’est pas disponible. Cette analyse n’est néanmoins pas recommandée s’il s’agit de faire la différence entre un chat sain et un chat atteint de CMH à un stade peu avancé. Bien que la concentration plasmatique du NT-proBNP augmente avec la sévérité de l’atteinte cardiaque, le chevauchement des valeurs entre les différents groupes ne permet pas de classer les cardiomyopathies (légère, modérée, sévère) sur la seule base des valeurs du NT-proBNP 5. De plus, un résultat inclus dans les valeurs usuelles ne suffit pas pour affirmer que le chat est indemne, notamment s’il présente une cardiomyopathie débutante, et ce résultat ne suffit pas non plus pour affirmer que le chat ne présentera jamais de cardiomyopathie. En cas de forte suspicion clinique, un résultat normal ne dispense donc pas d’effectuer d’autres examens, tels qu’une échocardiographie. A contrario, un résultat anormal devrait toujours encourager à poursuivre l’exploration 5. Une étude a cependant montré que le dosage quantitatif du NT-proBNP permettait de distinguer les chats présentant une CMH subclinique des chats sains, ainsi que les chats atteints d’une forme obstructive de CMH, versus une forme non obstructive. La même étude a établi une corrélation entre le NT-proBNP et la TnI, ainsi qu’entre le NT-proBNP et les différents marqueurs échocardiographiques de la sévérité de l’affection 12.

Le dosage de la TnI peut s’envisager pour dépister une CMH subclinique chez un chat, à condition d’utiliser une méthode de dosage très sensible 5. La concentration sérique en TnI est plus élevée chez les chats atteints que chez les chats sains, et cette concentration est corrélée avec la mesure de l’épaisseur de la paroi libre du ventricule gauche. Il est intéressant de noter que cette concentration sérique de TnI diffère significativement entre les groupes (chats sains, CMH légère, CMH modérée, CMH sévère, présence ou non de thrombus artériel, stade décompensé versus compensé…), et qu’elle augmente avec la sévérité de la CMH 13,14. Une étude a proposé la valeur seuil de 0,06 ng/mL pour différencier les chats sains des chats atteints de CMH subclinique, avec une sensibilité de 87,8 % et une spécificité de 95,4 %. La sensibilité atteint 100 % (en gardant 95,4 % de spécificité) lorsque cette valeur seuil est utilisée pour différencier les chats sains des chats présentant une CMH subclinique à un stade avancé 15. La sensibilité et la spécificité varient cependant selon les études, leurs objectifs, et la valeur seuil utilisée.

Les biomarqueurs et le suivi des cardiomyopathies félines

Peu d’études ont été consacrées à l’utilisation de ces deux biomarqueurs pour suivre l’évolution des cardiomyopathies félines et leur utilisation est surtout envisagée comme une des étapes de la démarche diagnostique. La TnI est décrite comme ayant une valeur pronostique : son augmentation plasmatique est associée à un risque accru de mort d’origine cardio-vasculaire, notamment chez les chats atteints de CMH, indépendamment de la présence d’une ICC ou d’une dilatation atriale gauche 5,16,17. Toutefois, mesurer régulièrement la TnI ne présente qu’un intérêt modéré dans le suivi et apporte peu d’information pronostique supplémentaire 17.

Fanny Bernardin

Une valeur pronostique est attachée au dosage de la TnI : une élévation des concentrations plasmatiques a été associée à un risque plus élevé de mort d’origine cardiaque, en particulier chez les chats atteints d’une CMH.

Fanny Bernardin

Les biomarqueurs dans les affections non cardiaques 

Puisque la TnI est éliminée par voie rénale, il a été montré que les chats atteints de maladie rénale chronique (MRC) pouvaient présenter des valeurs de TnI élevées même en l’absence de cardiomyopathie 15,18. De même, les atteintes respiratoires ou rénales sévères peuvent entraîner une élévation de la concentration plasmatique du NT-proBNP et augmenter ainsi la probabilité de faux positifs 19. Chez les chats atteints d’une MRC qui sont hypertendus, les concentrations en NT-proBNP sont supérieures à celles des chats sains ou des chats atteints d’une MRC sans hypertension associée. De la même manière, les concentrations de NT-proBNP sont plus élevées chez les chats atteints d’une MRC avancée par rapport aux autres stades. Il semblerait donc que le NT-proBNP constitue un marqueur potentiel de l’élévation de la pression artérielle systémique. Toutefois, chez les chats normotendus atteints d’une MRC légère à modérée, les concentrations de NT-proBNP ne sont pas significativement différentes de celles des chats sains.

L’intérêt pronostique de la TnI a été étudié chez le chien dans des situations critiques nécessitant des soins intensifs telles que la dilatation torsion de l’estomac, le syndrome de réponse inflammatoire systémique (SRIS), la défaillance multiorganique, ou encore la piroplasmose (détection d’une myocardite secondaire). Les données manquent encore chez le chat, notamment dans un contexte de SRIS, d’intoxication, d’hypoxie, d’anémie et d’hyperthermie 4.

Conclusion

Le NT-proBNP et la TnI font partie du panel des examens complémentaires disponibles pour explorer la fonction cardiaque et dépister d’éventuelles lésions. Il est important de ne pas formuler des conclusions trop hâtives ; mieux vaut les considérer comme les pièces d’un puzzle et réaliser dès que possible d’autres examens complémentaires, au premier rang desquels figure notamment l’échocardiographie. C’est la synthèse des différents résultats obtenus, couplée à l’examen clinique et à l’anamnèse, qui permettra in fine de poser un diagnostic éclairé.

Références

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Clémence Peyron

Clémence Peyron

La Dre Peyron est diplômée de l’École nationale vétérinaire de Lyon depuis 2007 En savoir plus

Fanny Bernardin

Fanny Bernardin

La Dre Bernardin est diplômée de l’École nationale vétérinaire d’Alfort depuis 2007. Elle a effectué un internat aux États-Unis avant d’en entreprendre un autre en médecine et chirurgie des animaux de compagnie à l’Université de Montréal En savoir plus

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