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Veterinary Focus

Numéro du magazine 32.2 Autre scientifique

L’asthme félin d’origine allergique

Publié 23/11/2022

Ecrit par Carol Reinero

Aussi disponible en Deutsch , Italiano , Español et English

L’asthme est une maladie fréquente chez le chat mais qui peut ressembler à de nombreuses autres maladies. Cet article montre à quel point le diagnostic et le traitement de cette affection peuvent être délicats.

Radiographies latérale (a) et dorso-ventrale (b) d’une chatte siamoise stérilisée de 2 ans, atteinte d’asthme

Points clés

L’asthme félin d’origine allergique est fréquent mais d’autres maladies respiratoires s’accompagnent des mêmes symptômes et des mêmes images radiographiques.


Une évaluation complète, visant à exclure d’autres maladies, éventuellement associée à un lavage des voies respiratoires, contribueront à confirmer le diagnostic.


Le traitement s’appuie sur les modifications de l’environnement, le contrôle du poids, les glucocorticoïdes et les bronchodilatateurs en cas de bronchospasmes.


Le pronostic sera réservé à bon selon que le chat présente surtout de la toux ou des crises d’asthme potentiellement mortelles ; il est lié à la réponse au traitement.


Introduction

L’asthme félin d’origine allergique est un motif fréquent de consultation vétérinaire. Il se manifeste par une toux, une respiration sifflante et une détresse respiratoire épisodique, cette dernière étant associée à un effort expiratoire accru (ou poussée abdominale). Le syndrome asthmatique est connu chez les chats depuis plus de 100 ans et il est signalé dans le monde entier. On estime que 1 à 5 % de la population féline serait touchée 1. L’asthme apparaît généralement en début de vie, bien que les chats présentant des symptômes légers soient présentés tard à la consultation vétérinaire car l’affection a tendance à évoluer progressivement, surtout en l’absence de soins médicaux. Toutes les races de chats sont potentiellement sensibles, bien qu’une prédisposition soit probable chez le Siamois.

L’asthme d’origine allergique se déclare chez des chats génétiquement prédisposés et exposés à certains facteurs environnementaux 2. Plus précisément, l’asthme d’origine allergique est un exemple de réaction d’hypersensibilité de type I à des aéroallergènes inhalés, au cours de laquelle les lymphocytes T helper 2 (ou lymphocytes Th2) orchestrent une réponse immunitaire qui endommage les voies respiratoires. Globalement, la réponse immunitaire favorise l’éosinophilie dans les voies respiratoires, l’hypersécrétion de mucus, l’hyperréactivité des bronches (en présence de déclencheurs non spécifiques, elles tendent à se contracter plus fortement que chez un chat sain), les bronchospasmes (qui sont au moins partiellement réversibles avec le temps ou un traitement) et le remodelage des voies respiratoires.

Diagnostic différentiel

Plusieurs causes parasitaires peuvent être responsables de toux, d’une respiration sifflante, de détresse respiratoire à l’expiration (en particulier lors d’un effort expiratoire accru) et d’images de radiographie thoracique avec des lésions bronchiques ou broncho-interstitielles. Il s’agit notamment de la dirofilariose cardiopulmonaire canine causée par les larves immatures L5 de Dirofilaria immitis, de la réponse immunitaire à l’aélurostrongylose féline due à Aelurostrongylus abstrusus (un nématode métastrongyloïde) et de la migration pulmonaire d’un nématode très fréquent, Toxocara cati. En outre, chez un chat qui tousse et qui présente un profil radiographique bronchocentrique, une bronchite chronique est à envisager, surtout s’il est relativement âgé au moment de l’apparition des premiers symptômes. Il s’agit d’une maladie inflammatoire en réponse à diverses agressions qui altèrent les voies respiratoires et la fonction mucociliaire, et qui se caractérise par une neutrophilie des voies respiratoires 3. Une insuffisance cardiaque congestive sera aussi suspectée chez un chat qui présente une détresse respiratoire (mais pas particulièrement à l’expiration) ou respire la bouche ouverte, surtout si un souffle cardiaque est perçu à l’auscultation. Enfin, les troubles bronchiolaires (ou maladie des petites voies aériennes) représentent un groupe important mais rarement reconnu d’affections qui peuvent être confondues avec l’asthme 4. Il n’y a pas de signes cliniques pathognomoniques pour les maladies bronchiolaires et elles ne sont pas identifiables à la radiographie. La tomographie (CT) du thorax et éventuellement une biopsie pulmonaire sont nécessaires pour repérer et caractériser ce type de troubles spécifiques. Un sous-type, la bronchiolite oblitérante constrictive, provoque des signes très semblables à ceux observés chez les chats asthmatiques (avec des crises d’asthme potentiellement mortelles).

Diagnostic

Antécédents, symptômes et examen clinique

Bien qu’il ne s’agisse pas à proprement parler de tests diagnostiques, la prise en compte des antécédents, des symptômes rapportés par le propriétaire et des résultats de l’examen clinique constitue une première étape essentielle avant de parvenir à un diagnostic d’asthme allergique félin. Il n’existe pas de test unique permettant de poser un diagnostic définitif, mais des examens complémentaires permettront d’exclure ou de rendre moins probables des maladies cliniquement similaires, et de placer l’asthme en haut de la liste du diagnostic différentiel. Comme cela a déjà été dit, lorsque les premiers signes sont observés à un jeune âge (même si le chat n’est présenté pour traiter ses troubles que plus tard), l’asthme ou une bronchite parasitaire sont à suspecter en priorité. Lorsque les premiers signes apparaissent plus tard dans la vie, la bronchite chronique devient plus probable.

Radiographie thoracique

La radiographie thoracique est l’un des premiers examens diagnostiques couramment effectués chez tout chat présentant des signes cliniques respiratoires. Il est important de noter que des radiographies thoraciques normales sont observées chez environ un quart des chats présentant une maladie des voies aériennes inférieures 5. En général, les lésions sont bronchocentriques, de type bronchique ou broncho-interstitiel (Figure 1). Dans certaines maladies parasitaires, les lésions interstitielles parcellaires peuvent dominer, et les artères pulmonaires crâniales ou caudales peuvent être dilatées. Chez les chats en crise d’asthme, le piégeage de l’air se traduit par une augmentation du volume de certaines zones pulmonaires, avec une opacification réduite (Figure 2). Dans ce cas, le diaphragme peut être aplati et, sur une projection latérale, la distance augmente entre le bord caudal de la silhouette cardiaque et le diaphragme. Tout trouble respiratoire entraînant une hypersécrétion de mucus peut conduire à l’obstruction des bronches lobaires (le plus souvent dans le lobe pulmonaire moyen droit ou la partie caudale du lobe pulmonaire crânial gauche) et à l’atélectasie du lobe affecté. La radiographie peut également permettre d’exclure bien d’autres troubles cardiopulmonaires (par exemple, une néoplasie métastatique ou un épanchement pleural).

Radiographie thoracique latérale d’un chat à poil court stérilisé de 6 ans, atteint d’asthme

Figure 1a. Radiographie thoracique latérale d’un chat à poil court stérilisé de 6 ans, atteint d’asthme. Des lésions bronchiques diffuses sont visibles dans le champ pulmonaire. 
© Dre Carol Reinero.

Une vue agrandie montre l’épaississement des voies respiratoires (en forme de donut) en coupe transversale

Figure 1b. Radiographie thoracique latérale d’un chat à poil court stérilisé de 6 ans, atteint d’asthme. Une vue agrandie montre l’épaississement des voies respiratoires (en forme de donut) en coupe transversale (flèche).
© Dre Carol Reinero.

Lateralradiographs from a 2-year-old female spayed Siamese cat with asthma
a
dorsoventral (b) radiographs from a 2-year-old female spayed Siamese cat with asthma
b

Figure 2. Radiographies latérale (a) et dorso-ventrale (b) d’une chatte siamoise stérilisée de 2 ans, atteinte d’asthme. Sur les deux images, des lésions bronchiques diffuses et modérées sont visibles, et les poumons sont hypergonflés. Noter l’enroulement du diaphragme sur la projection dorso-ventrale.
© Dre Carol Reinero

 

Échographie pulmonaire

L’utilisation de l’échographie pulmonaire au chevet des chats (POCUS pour « point of care ultrasound ») présentant une respiration laborieuse devient de plus en plus courante en clientèle généraliste et spécialisée 6. L’échographie peut détecter des anomalies dans la cavité pleurale, notamment un pneumothorax (se traduisant par un manque de scintillement ou l’absence de signe de glissement pleural) ou un épanchement pleural (liquide hypoéchogène). Des signes de maladie cardiaque, qui sortent du cadre de cet article, peuvent apparaître. Les autres anomalies pulmonaires comprennent les lignes B et des plages de consolidation d'apparence nodulaire, tissulaire, en dents de scie et en coin. Lorsque l’asthme est à l’origine des signes respiratoires d’un chat, toutes ces anomalies doivent être absentes : le poumon est habituellement qualifié de sec (Figure 3), à l’exception peut-être d’un signe du tissu dans une région lobaire qui a subi une atélectasie suite à un bouchon muqueux.

Échographie pulmonaire réalisée chez un chat à poil court, mâle castré de 4 ans, suspecté d’asthme

Figure 3. Échographie pulmonaire réalisée chez un chat à poil court, mâle castré de 4 ans, suspecté d’asthme. Cette image représente un poumon sec, c’est-à-dire qu’aucune lésion ne se détache de la ligne pulmonaire (pointes de flèche blanches). Les têtes des côtes et leurs ombres au loin sont indiquées par les flèches blanches.
© Dre Carol Reinero.

Données minimales

Un hémogramme complet peut révéler une éosinophilie, compatible avec l’asthme ou une maladie parasitaire, mais l’absence d’éosinophilie périphérique n’exclut pas une éosinophilie dans les voies respiratoires. Un profil biochimique sérique ou une analyse d’urine ne sont d’aucune aide pour le diagnostic de l’asthme. Si un chat doit subir une anesthésie générale pour des examens d’imagerie avancée ou un lavage des voies respiratoires, il est cependant important d’explorer son état général.

Recherche d’infestation parasitaire

Pour détecter une maladie parasitaire, il est utile de pratiquer le test de flottation fécale, le test de Baermann et, dans les régions endémiques, des tests de dépistage d’anticorps et d’antigènes de filaires cardiaques 7. Toxocara cati peut passer inaperçu lors du test de flottation fécale si la migration pulmonaire est en cours pendant la période prépatente. Il est généralement recommandé de répéter jusqu’à trois fois le test fécal de Baermann car les larves d’Aelurostrongylus abstrusus peuvent être crachées et avalées par intermittence avant d’apparaître ensuite dans les selles. Traiter le chat avec un anthelminthique approprié peut être plus économique que de procéder à des tests parasitaires spécifiques.

Imagerie diagnostique avancée et lavage broncho-alvéolaire 

Bien qu’elle ne soit pas couramment réalisée chez les chats suspectés d’asthme, un examen thoracique par scanner (CT) peut être extrêmement utile et constitue la meilleure technique d’imagerie pour identifier un trouble bronchiolaire ressemblant à l’asthme 4. Le CT peut être utilisé lorsque les premiers examens n’ont pas permis pas de poser un diagnostic car cette technique identifie de manière très sensible une grande variété de troubles pulmonaires, vasculaires, pleuraux et cardiaques 8.

La bronchoscopie, une technique qui permet d’inspecter la lumière de l’arbre trachéobronchique, apporte rarement des informations diagnostiques importantes chez un chat asthmatique. Chez lui, la plupart des changements sont non spécifiques et diffus. De plus, bien que le lavage broncho-alvéolaire (LBA) puisse être réalisé à l’aide d’un bronchoscope, il est préférable de le réaliser en aveugle en clientèle généraliste, car il peut ainsi être fait rapidement, avec un équipement minimal. Le LBA est très utile pour aider à confirmer le diagnostic d’asthme : à première vue, le prélèvement a en général l’aspect d’un fluide légèrement opaque, surmonté d’une couche blanche et mousseuse de surfactant (Figure 4). La technique recommandée est présentée dans l’Encadré 1. L’échantillon de LBA sera soumis à un examen cytologique et mis en culture. Si Mycoplasma spp. ne peut pas être cultivé, une PCR peut être effectuée à la place. La présence d’une augmentation des éosinophiles dans le LBA est en faveur d’une maladie parasitaire ou d’un asthme d’origine allergique, et cela souligne l’importance d’essayer d’exclure une étiologie parasitaire par des tests ou un traitement anthelminthique avant de procéder au LBA. Lorsque l’examen cytologique indique une inflammation suppurative non septique, une bronchite chronique sera suspectée. Une inflammation suppurative septique, associée en particulier à une culture positive d’une espèce bactérienne cliniquement pertinente, peut refléter une infection bactérienne secondaire à une maladie primaire des voies respiratoires basses. Bien que les infections bactériennes secondaires soient rares, elles doivent faire l’objet d’un traitement spécifique et il est donc important de les repérer.

Liquide de lavage broncho-alvéolaire immédiatement après le prélèvement

Figure 4. Liquide de lavage broncho-alvéolaire immédiatement après le prélèvement. Le fluide prélevé est légèrement opaque, la couche supérieure présente un surfactant mousseux, ce dernier indiquant un lavage profond.
© Dre Aida Vientos-Plotts. 

Encadré 1. Technique de lavage broncho-alvéolaire (LBA).

  1. Administrer de la terbutaline (0,01 mg/kg SC/IM) 15 minutes avant l’intervention. Préparer un tube stérile en caoutchouc rouge en coupant l’embout le plus distal avec un trou latéral et fixer la partie proximale à une seringue standard de 20-30 mL.
  2. Préoxygéner, induire l’anesthésie (au propofol, par exemple) puis intuber avec un tube endotrachéal (TET) stérile. Fixer un oxymètre de pouls pour la surveillance.
  3. Le chat étant en décubitus latéral avec la tête/le cou étendus, passer le tube en caoutchouc stérile à travers le TET jusqu’à ce qu’il soit doucement calé dans une voie aérienne distale.
  4. Fixer rapidement une seringue contenant 20 mL de solution saline stérile à l’extrémité du tube en caoutchouc et instiller la solution. Sans tirer sur le tube, aspirer doucement et attendre que la seringue se remplisse. Si la pression est négative ou si la seringue ne se remplit plus, tirer très lentement le tube de quelques millimètres et répéter l’opération. Si de l’air est aspiré dans la seringue, le tube sera avancé à nouveau. Le protocole peut être répété comme indiqué mais en surveillant attentivement l’anesthésie, y compris l’oxymètre de pouls. Un bon rendement correspond à 50-80 % du volume instillé mais des volumes plus petits sont acceptables s’il y a du surfactant (couche mousseuse) ou si le fluide est opaque.
  5. Retirer le tube en caoutchouc, fixer le TET à un circuit d’oxygène et placer le chat en décubitus sternal. Si des gargouillis sont entendus ou si la récupération du LBA est difficile, envisager de déconnecter brièvement le chat et de le tenir verticalement (tête en bas) tout en drainant le fluide du TET. Rebrancher ensuite l’oxygène.
  6. Extuber si nécessaire. Si le chat présente une maladie modérée à sévère ou récupère mal, le mettre dans une cage à oxygène pendant plusieurs heures/nuit en le surveillant régulièrement.

 

Autres tests diagnostiques

Il est moins fréquent de tester la fonction pulmonaire ou de pratiquer des tests allergiques (recherche d’IgE sériques spécifiques de certains allergènes 9 ou tests intradermiques). Chez les personnes souffrant d’asthme d’origine allergique, tester la fonction pulmonaire (par spirométrie) est un outil majeur pour le diagnostic et le suivi thérapeutique mais, comme cela implique que le patient expire fortement dans un embout buccal, ce n’est pas praticable chez le chat. Il existe d’autres moyens d’étudier la mécanique pulmonaire, mais l’équipement spécial et l’expertise qu’ils requièrent font qu’ils sont principalement utilisés dans la recherche. En revanche, les tests allergiques (notamment sériques) sont largement disponibles et peuvent aider à concevoir une stratégie d’évitement des allergènes.

Traitement

Le traitement de l’asthme félin doit s’adapter à la présentation clinique et différera donc suivant qu’il s’agit d’un chat instable en phase asthmatique ou présentant une détresse respiratoire manifeste, ou d’un chat stable avec des signes cliniques moins graves (le plus souvent une toux mais aussi une respiration sifflante ou une intolérance à l’exercice légère à modérée). En phase d’état de mal asthmatique, le traitement général consiste à apporter de l’oxygène, à limiter les manipulations et les contraintes, à administrer un sédatif (pour améliorer la respiration) et un bronchodilatateur (avec ou sans glucocorticoïde), puis à laisser le chat se calmer dans une cage isolée. Lorsqu’un chat est cliniquement stable et ne présente que des signes légers à modérés, le traitement inclut des glucocorticoïdes et des bronchodilatateurs dans certains cas. Chez tous les chats asthmatiques, des modifications de l’environnement et des mesures pour encourager si besoin la perte de poids sont généralement recommandées.

Traitement du chat en détresse respiratoire

Un chat présentant une crise d’asthme potentiellement mortelle (en état de mal asthmatique) doit recevoir un bronchodilatateur. La voie injectable est à privilégier dans les cas critiques (par exemple, terbutaline à 0,01 mg/kg SC ou IM) car un bronchospasme grave gêne l’inhalation du bronchodilatateur dans les voies aériennes inférieures. Lorsque cela n’est pas possible, le bronchodilatateur à inhaler (l’albutérol, par exemple) sera administré à l’aide d’un aérosol-doseur avec une chambre d’inhalation (90 mcg/bouffée, deux bouffées) à répéter toutes les 15 à 20 minutes ; la première dose permet théoriquement d’obtenir une certaine bronchodilatation, ce qui permet ensuite, à la seconde dose, de mieux atteindre le site d’action ciblé. Un chat en état de mal asthmatique devra par ailleurs être manipulé le moins possible (et disposer d’un endroit où se cacher et se calmer), recevoir de l’oxygène et, dans certains cas, un sédatif. Des glucocorticoïdes seront également administrés, mais ils sont en général plus longs à agir, ce qui souligne l’importance du bronchodilatateur à action rapide pour lever l’obstruction au flux d’air.

Une fois que la crise est passée et que les signes cliniques sont stables, le chat sera traité comme indiqué ci-dessous (traitement du chat stable), à la différence près que pour un chat présentant des crises d’asthme à répétition, le traitement bronchodilatateur doit être intégré à la prise en charge médicale à long terme. Les bronchodilatateurs appartiennent principalement à deux grandes classes de médicaments : les méthylxanthines et les bêta-2 agonistes (ces derniers pouvant avoir une action courte ou longue). Les méthylxanthines sont habituellement proposées par voie orale et la théophylline, en comprimés ou en gélules de 100 mg à libération prolongée, est en général facilement administrée tous les jours ou tous les deux jours. Les bêta-2 agonistes à courte durée d’action sont puissants et agissent rapidement. Ils sont administrables par voie orale ou par inhalation (via un aérosol doseur avec une chambre d’inhalation ou en nébulisation). Chez les personnes asthmatiques, une inhalation de glucocorticoïdes est couramment associée à celle des bêta-2 agonistes à longue durée d’action, mais il existe peu de données montrant leur efficacité chez le chat asthmatique. Comme ils sont moins puissants, ils ne sont pas recommandés pour un chat en crise d’asthme. En règle générale, les bronchodilatateurs oraux sont recommandés pour un usage régulier et quotidien, tandis que l’inhalation ou l’injection d’un bronchodilatateur sera envisagée comme un traitement de « secours » en situation d’urgence. L’utilisation régulière et répétée de mélanges racémiques de bêta-2 agonistes à courte durée d’action (par exemple, l’albutérol R-S, connu sous le nom de salbutamol dans certains pays) a été associée à une exacerbation paradoxale de l’inflammation des voies respiratoires chez le chat, en raison des effets délétères de l’énantiomère S 10. Lorsqu’il faut faire inhaler régulièrement un bêta-2 agoniste à courte durée d’action, le lévalbutérol (c’est-à-dire l’énantiomère R, séparé de l’énantiomère S) est commercialisé. Si le chat ne tolère pas les bronchodilatateurs inhalés, et lorsque la législation nationale le permet, il est aussi possible d’apprendre aux propriétaires à injecter la terbutaline en cas d’urgence.

Traitement du chat stable

Comme évoqué précédemment, des mesures non spécifiques visant à modifier l’environnement et à lutter contre l’obésité sont en général applicables à tous les chats asthmatiques dans le cadre du traitement à long terme. L’inhalation d’allergènes (intérieurs et extérieurs) et de substances irritantes dans l’environnement peut en effet déclencher des signes cliniques chez les chats sensibles. Les allergènes peuvent en être directement responsables, via des réactions d’hypersensibilité de type I (comme indiqué ci-dessus), tandis que les irritants favorisent l’hyperréactivité des voies respiratoires de manière non spécifique. Si les allergènes peuvent être identifiés grâce à des tests d’IgE spécifiques, mieux vaut les éliminer (si possible) ou diminuer l’exposition. Par exemple, pendant la saison où l’exposition aux allergènes extérieurs est élevée, un chat sensible au cynodon (Bermuda grass) pourra être gardé à l’intérieur, fenêtres fermées, afin d’éviter ou au moins de réduire la charge allergénique. Si le chat est sensibilisé à des allergènes domestiques, tels que les acariens, il peut être utile d’utiliser des filtres à particules hautement efficaces (en tant qu’unités autonomes et dans les aspirateurs) ainsi que des housses anti-acariens pour les oreillers et la literie, en les lavant régulièrement à l’eau chaude. Pour lutter contre les irritants, les propriétaires doivent faire en sorte de limiter l’exposition du chat à la fumée, aux aérosols, aux poudres et aux poussières. Il peut, par exemple, être utile d’opter pour une litière moins poussiéreuse. Questionner soigneusement les propriétaires peut aider à identifier les substances qui posent problème ; ils seront ensuite conseillés sur la meilleure façon d’améliorer l’environnement du chat. 

L’obésité impacte de manière négative le système immunitaire et exerce un stress supplémentaire sur le système respiratoire. Les chats asthmatiques doivent donc être gardés à un poids idéal, voire légèrement inférieur. L’obésité influence aussi la posologie des médicaments et il est important de prescrire les glucocorticoïdes et les bronchodilatateurs en fonction de la masse maigre estimée. 

Les glucocorticoïdes sont essentiels dans le traitement à long terme d’un chat asthmatique car ils diminuent l’hyperréactivité du système immunitaire aux aéroallergènes et réduisent l’inflammation des voies respiratoires ; cela permet d’atténuer ensuite l’hyperréactivité et le remodelage des voies respiratoires. La dose de glucocorticoïdes sera progressivement réduite jusqu’à trouver la dose efficace la plus faible permettant de contrôler les signes cliniques et, idéalement, l’inflammation des voies respiratoires. Ils peuvent être administrés par voie injectable, orale ou nasale. Les corticoïdes à action prolongée, comme la méthylprednisolone injectable, sont déconseillés car ils deviennent moins efficaces au fil du temps et nécessitent des doses plus élevées ou des injections plus fréquentes ; de plus, ils augmentent le risque de diabète sucré. Cependant, lorsque le traitement du chat par une autre voie se révèle difficile (par exemple, en raison de son caractère), cela peut être la seule option thérapeutique viable. L’auteure privilégie l’utilisation d’un glucocorticoïde oral, en commençant généralement par la prednisolone à une dose de 1 à 2 mg/kg/jour. Cette formulation est économique, efficace et facilement disponible en comprimés ou en liquide. Comme les glucocorticoïdes injectables et oraux peuvent avoir des effets négatifs sur les réponses endocriniennes et immunitaires systémiques, il est également intéressant d’envisager d’administrer de fortes doses de stéroïdes au niveau pulmonaire. Les stéroïdes inhalés, comme la fluticasone, conviennent alors très bien, surtout si l’on considère que l’asthme est souvent diagnostiqué chez les jeunes chats et que les glucocorticoïdes doivent être administrés à vie. L’auteure administre la fluticasone à la dose de 220 mcg/bouffée, deux fois par jour, par le biais d’une chambre d’inhalation, tout en ajoutant la prednisolone par voie orale pendant la première ou les deux premières semaines, car les stéroïdes inhalés n’agissent pas immédiatement. Les corticoïdes oraux seront ensuite progressivement réduits jusqu’à ce que le chat ne reçoive plus que des corticoïdes inhalés. Si les signes cliniques sont résolus ou s’améliorent régulièrement, la dose de corticoïdes inhalés pourra être réduite à 110 mcg/bouffée, deux fois par jour. Lorsque l’asthme est toujours bien contrôlé, elle pourra ensuite passer à 44 mcg/bouffée, deux fois par jour. Les propriétaires doivent cependant savoir qu’il est nécessaire de traiter un chat asthmatique à vie avec les corticoïdes, même s’il ne présente pas toujours de signes cliniques. En effet, un chat affecté peut présenter une inflammation subclinique des voies aériennes (c’est-à-dire aucun signe clinique mais une éosinophilie microscopique persistante des voies aériennes) qui peut endommager chroniquement ses voies aériennes et occasionner des changements architecturaux permanents dans les poumons, ce qui complique le traitement 11.

Les bronchodilatateurs ne sont pas forcément nécessaires chez un chat asthmatique stable qui ne présente que de la toux, en supposant qu’il réponde bien aux glucocorticoïdes. Les bronchodilatateurs ont de nombreux effets indésirables (excitation, hypertension systémique, tachycardie, etc.) et, comme le chat peut avoir besoin d’autres médicaments (par voie orale ou inhalée), il est important de ne pas prescrire automatiquement ce type de médicaments à chaque chat asthmatique. Chez un chat stable mais chroniquement atteint, chez qui les modifications de l’environnement, le contrôle du poids et le traitement corticoïde ne suffisent pas, l’administration d’un bronchodilatateur peut être cependant proposée. L’utilisation régulière de bronchodilatateurs restera sans doute indispensable pour un chat ayant des antécédents de détresse respiratoire épisodique, comme indiqué dans le paragraphe ci-dessus.

Carol R. Reinero

Prendre en compte les commémoratifs, les symptômes observés par le propriétaire et les résultats de l’examen clinique constitue une première étape essentielle avant de parvenir à un diagnostic d’asthme félin d’origine allergique.

Carol R. Reinero

Monitoring et pronostic

L’objectif du traitement d’un chat asthmatique est double : atténuer ou éliminer les symptômes affectant sa qualité de vie (par exemple, la toux, l’intolérance à l’effort, la détresse respiratoire), et freiner le développement des lésions afférentes à l’asthme (notamment l’inflammation, l’hyperréactivité et le remodelage des voies aériennes). Ces deux objectifs ne sont pas toujours atteints en parallèle car les signes cliniques et l’inflammation des voies respiratoires ne sont pas forcément corrélés 11. Le clinicien ne peut donc pas être sûr que l’inflammation est contrôlée chez un chat asymptomatique sous glucocorticoïdes. Le lavage répété des voies respiratoires, bien qu’invasif, est le seul moyen actuel de déterminer si l’inflammation microscopique est bien contrôlée. Il est cependant important de noter que si les symptômes persistent, surtout s’ils sont modérés à sévères, cela signifie que le traitement actuel est insuffisant et qu’il doit évoluer pour mieux contrôler l’asthme, ou que des comorbidités doivent être explorées.

La morbidité de l’asthme varie et il existe une mortalité occasionnelle. Étant donné qu’il apparaît généralement chez les jeunes chats, il faut insister sur la nécessité de la prise en charge à vie, qui minimisera les lésions irréversibles des voies respiratoires. Les chats qui présentent principalement de la toux répondent bien au traitement médical, mais ceux qui présentent des épisodes de détresse respiratoire sont plus susceptibles d’être régulièrement hospitalisés à plusieurs reprises, et le risque de décès n’est pas nul. 

Conclusion

L’asthme félin d’origine allergique est un trouble respiratoire fréquent qui doit être différencié des autres maladies à l’origine des mêmes symptômes. Le diagnostic s’appuie sur les commémoratifs, les signes rapportés par le propriétaire, les résultats de l’examen clinique, les tests diagnostiques et le lavage des voies respiratoires. Le traitement dépend de la présentation du cas : un chat en état de mal asthmatique doit recevoir un bronchodilatateur, un glucocorticoïde, de l’oxygène, éventuellement un sédatif, et être laissé au calme. Un chat dont l’asthme est contrôlé doit recevoir des glucocorticoïdes à vie, plus éventuellement des bronchodilatateurs, mais des modifications de l’environnement et une surveillance du poids s’imposent pour tous les animaux affectés. Le traitement sera adapté à chaque chat, la diminution progressive des médicaments étant idéalement raisonnée en fonction de la résolution des symptômes et de l’inflammation des voies respiratoires lorsque cela est possible.

Références

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Carol Reinero

Carol Reinero

La Dre Reinero est diplômée de l’Université Davis de Californie depuis 1995 En savoir plus

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Le lymphome médiastinal félin

Le lymphome est l’une des maladies cancéreuses les plus fréquentes chez le chat. James Elliott fait notamment remarquer que la forme médiastinale est à inclure dans le diagnostic différentiel lorsqu’un chat présente des signes respiratoires.

par James Elliott