Considérations pratiques
Concevoir et mettre en œuvre des protocoles est un projet à long terme qui impliquera finalement de nombreux processus dans des domaines très différents de votre activité ; comme nous l’avons déjà mentionné, il est fortement recommandé de commencer avec un projet pilote ciblé sur un sujet limité et très spécifique. L’objectif est de mettre en exergue les avantages perceptibles des protocoles dans la vie quotidienne de la clinique. Il est donc conseillé de choisir une procédure facile mais utile telle qu’un service classique de médecine préventive ; c’est probablement le meilleur moyen de motiver rapidement l’équipe sans trop d’efforts.
Comme nous l’avons vu plus haut, le projet doit être présenté lors d’une réunion de l’équipe ; l’objectif est simplement d’instaurer un premier débat, de proposer l’idée d’une phase pilote et de soumettre une courte liste de sujets envisageables. En supposant que l’équipe se mette d’accord sur un sujet, un petit groupe de volontaires sera constitué (par exemple, deux « concepteurs », généralement un clinicien et une ASV si l’on choisit un service de médecine préventive classique) ainsi qu’une équipe de révision, là encore avec un clinicien et une ASV. En se basant sur « les meilleures pratiques » de la clinique pour cette procédure, les concepteurs rédigent une première version, puis les réviseurs la vérifient et donnent leur avis. Le protocole sera ensuite affiné si nécessaire et, après une deuxième consultation avec les réviseurs, le projet sera finalisé (Encadré 1) et prêt pour une relecture plus large. À ce stade, tous les membres de l’équipe peuvent formuler des commentaires, des critiques ou des propositions d’amendements au projet de protocole. Lors de la réunion d’équipe suivante, la version finale du protocole sera présentée et le document sera soit approuvé par consensus, soit modifié si nécessaire. Le cas échéant, il sera signé par la direction ou par le directeur clinique pour les protocoles médicaux.
Encadré 1. Exemple de protocole pour un « bilan annuel de santé chez un chien adulte ».
Cette adoption officielle constitue le point de départ de la mise en œuvre du protocole mais une période probatoire (généralement de 3 à 6 mois) est nécessaire afin de détecter toute difficulté majeure et d’apporter les ajustements nécessaires suite aux retours de l’équipe. À la fin de la période probatoire, le groupe de travail éditera une seconde version du protocole qui entrera alors dans la phase définitive de mise en œuvre et d’entretien.
Contrôler l’efficacité des protocoles
Supposons que vous désiriez normaliser la façon dont votre équipe remplit les dossiers cliniques lorsqu’elle examine un animal ; plus précisément, vous voudriez insister sur la nécessité d’évaluer l’indice de condition corporelle (ICC) et l’indice de condition dentaire (ICD) pour tous les animaux. Comment pouvez-vous vous assurer que votre équipe adhère à cet objectif ? Plusieurs approches sont possibles, en utilisant des moyens basiques ou plus sophistiqués :
- Effectuez périodiquement un contrôle aléatoire de 20 à 30 consultations effectuées par chaque vétérinaire et vérifiez si l’ICC et l’ICD ont été consignés dans les dossiers cliniques.
- Utilisez le logiciel de gestion de la clinique pour générer une liste de tous les dossiers qui ne contiennent pas d’informations sur l’ICC ou l’ICD, et notez quel vétérinaire a examiné chacun de ces animaux la dernière fois.
- Travaillez avec le fournisseur du logiciel pour faire en sorte qu’un avertissement en couleur apparaisse sur l’écran du dossier clinique si l’ICC ou l’ICD de l’animal est manquant ou n’a pas été mis à jour au cours des 12 derniers mois. Le logiciel peut également générer un rapport listant tous les animaux concernés par cet avertissement, ainsi que le vétérinaire ou l’ASV qui ont vu l’animal pour la dernière fois.
Les efforts et les ressources investis dans les activités de mesure et de contrôle peuvent évidemment varier beaucoup. Une question intéressante, et presque philosophique, est : ne serait-il pas plus efficace de consacrer la même énergie à sensibiliser et à convaincre toute l’équipe que le fait de suivre ce protocole présente des avantages pour l’animal ? En d’autres termes, essayez d’obtenir de chacun qu’il suive le protocole non pas parce qu’il a peur d’être épinglé s’il ne le fait pas, mais plutôt parce qu’il est convaincu que c’est ce qu’il faut faire.
La question de savoir s’il faut offrir une récompense financière aux membres du personnel qui suivent les protocoles se pose parfois. Il y a des arguments pour et contre ce type d’incitation (Encadré 2) mais, selon l’expérience des auteurs, une incitation n’est en général pas nécessaire pour adhérer aux protocoles (Figure 2).
Encadré 2. Avantages et inconvénients du versement d’une prime pour le respect des protocoles.