Le chat et les fibres alimentaires
Les nutritionnistes et les vétérinaires s’intéressent depuis des années aux fibres alimentaires en tant qu’ingrédient des aliments pour animaux ou en tant que complément.
Numéro du magazine 24.3 Communication
Publié 10/03/2021
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Les gens adoptent souvent un animal domestique pour répondre à un besoin psychologique, comme le désir d’avoir un compagnon, mais leur démarche d’adoption se concentre généralement sur l’animal qui répondra le mieux à leurs besoins sans envisager les besoins de l’animal lui-même…
Le bon sens, la réflexion logique et la prescription ne suffisent pas toujours à induire un changement de comportement du propriétaire vis-à-vis de son animal. Les propriétaires sont une minorité à suivre correctement les prescriptions du vétérinaire, et l’observance a tendance à se dégrader au fil du temps.
La relation propriétaire-vétérinaire joue un rôle clé dans l’efficacité des recommandations nutritionnelles. Le vétérinaire n’a pas besoin d’être psychologue, mais il doit comprendre les principes de la communication et les mécanismes qui régissent les relations humaines.
En connaissant certaines des grandes règles sociales de la persuasion, le vétérinaire peut plus facilement convaincre un propriétaire de suivre ses instructions.
Les gens adoptent souvent un animal domestique pour répondre à un besoin psychologique, comme le désir d’avoir un compagnon, mais leur démarche d’adoption se concentre généralement sur l’animal qui répondra le mieux à leurs besoins sans envisager les besoins de l’animal lui-même… Dans un monde idéal, le propriétaire devrait demander conseil à un vétérinaire sur la meilleure manière d’élever un animal et d’optimiser la relation Homme-animal avant d’adopter, mais cela se produit rarement. En ignorant la compatibilité entre son mode de vie, les raisons qui l’amènent à adopter et les besoins de l’animal, le futur possesseur risque de compromettre à la fois le bien-être de l’animal et la qualité de sa relation avec lui.
Un des points sur lesquels le propriétaire manque souvent de satisfaire les besoins fondamentaux de l’animal est l’alimentation. La majorité des animaux domestiques dépendent exclusivement de leurs propriétaires pour la satisfaction de leurs besoins nutritionnels. Cependant, les vétérinaires remarquent que beaucoup de clients ignorent que les besoins nutritionnels des animaux peuvent varier de manière importante et par exemple que la nutrition du chien diffère de celle du chat ! Un propriétaire mal informé, inattentif ou ignorant aura tendance à s’occuper de son animal de manière simpliste, imposant un comportement anthropomorphique dans divers contextes, dont l’alimentation. L’animal deviendra ainsi la victime du comportement inadapté de son propriétaire, avec des conséquences parfois graves et pathologiques, comme le développement d’un surpoids ou d’une obésité.
Quand cette situation n’est pas évitable par une information adaptée, l’intervention d’un professionnel s’avère nécessaire pour corriger le régime alimentaire de l’animal. Il ne s’agit toutefois pas simplement de choisir l’aliment qui favorisera la perte de poids ou le maintien d’un poids acceptable. Les nutritionnistes ont remarqué qu’un aliment de contrôle pondéral seul ne suffit pas toujours à atteindre l’objectif visé dans un contexte domestique, souvent bien différent de l’environnement dans lequel le produit a été développé et testé avec succès 1. Cela s’explique par la relation qui s’est établie entre l’animal et son propriétaire. Pour envisager l’intervention qui permettra de corriger la mauvaise distribution des repas et d’éviter une mauvaise utilisation de l’aliment, il est essentiel de tenir compte de la relation Homme-animal et d’assurer une prise en charge du propriétaire.
En contrôlant l’alimentation, l’animal sera globalement plus facile à gérer, car le propriétaire pourra communiquer clairement et de manière cohérente avec son animal de sorte qu’il soit à la fois motivé et obéissant. Il est donc crucial d’expliquer clairement les instructions, même les plus banales – comme le nombre et les heures des repas – pour contrôler les quantités distribuées à chaque repas et éviter le grignotage. Sinon, le propriétaire risquera de donner des encas, soit pendant ses propres repas (Figure 1), soit pour empêcher des comportements indésirables tels que miaulements ou aboiements incessants.
Outre l’alimentation, l’exercice physique joue un rôle important. Il est facile de faire bouger les chiens lors de leurs promenades quotidiennes, même si le niveau d’exercice doit être adapté à la taille de l’animal. Pour les chats, l’exercice physique doit être encouragé en utilisant des jouets distributeurs de nourriture (Figure 2), ou en cachant des petites quantités d’aliment dans des endroits situés en hauteur. Ces activités sont aussi en lien avec les besoins éthologiques de l’animal qui incluent des comportements d’exploration ou de prédation, et des contacts sociaux intra- et inter-spécifiques. Elles permettent au propriétaire de partager des moments agréables avec son animal.
Enfin, pour que les prescriptions du vétérinaire conduisent au résultat souhaité, il est important de s’assurer que la personne chargée de nourrir l’animal a non seulement bien compris les informations données mais qu’elle adhère pleinement aux recommandations. Il n’y a aucune garantie que les instructions, qu’elles soient orales ou écrites, seront effectivement appliquées. Comme les patients humains, les propriétaires ne seront qu’une minorité à suivre correctement les instructions de traitement, l’observance diminuant progressivement avec le temps.
Plus que dans toute autre discipline médicale, il est essentiel que le vétérinaire établisse une bonne relation avec le propriétaire pour que ses instructions puissent se révéler efficaces. Le propriétaire étant le tuteur de l’animal, les instructions ne pourront aboutir que si le propriétaire adopte un comportement adapté. Le vétérinaire doit donc comprendre que sa relation avec le propriétaire joue un rôle central dans l’efficacité de ses instructions nutritionnelles. Il n’est pas nécessaire qu’il devienne psychologue, mais il est essentiel qu’il comprenne les mécanismes qui régissent les relations humaines et les principes de la communication.
Il est capital de faire très attention au premier contact entre le propriétaire et la clinique, ou plutôt entre le propriétaire et le premier membre de l’équipe qu’il rencontrera. Rappelons qu’il n’y a pas que les animaux qui ont un instinct de survie, les êtres humains aussi ! Les schémas comportementaux primitifs, comme le marquage du territoire, s’observent couramment chez les chiens et les chats, mais les codes culturels et sociaux évolués développés au cours des siècles font que l’Homme n’exprime plus nécessairement ses caractéristiques comportementales primitives, du moins ouvertement : ces signes sont aujourd’hui masqués. Pour faire simple, le principe de base pour toute espèce vivante est le principe de survie et quand deux personnes se rencontrent pour la première fois, l’inconscient se pose certaines questions : est-ce que cette personne sera amie ou ennemie, est-ce qu’elle m’aidera ou me combattra, sera-t-elle capable de répondre à mes besoins ou restera-t-elle une menace ?
La réponse doit être immédiate et la règle dite des « 4 x 20 » s’applique. Quatre éléments fondamentaux (avec un facteur de 20) s’enclenchent de manière inconsciente quand deux personnes se rencontrent pour la première fois, afin d’évaluer rapidement si l’interlocuteur est ami ou ennemi. Ce processus permet à l’individu d’adopter le comportement nécessaire à sa survie.
Ces éléments fondamentaux sont :
Il est donc indispensable que la personne responsable du contact initial avec les nouveaux clients ait conscience de ce phénomène et veille à adopter l’attitude la plus accueillante possible (Figure 3). Cela aidera à convaincre le propriétaire que chaque membre de l’équipe vétérinaire est un ami capable de répondre à ses besoins. Les qualités requises sont un comportement attentif et accueillant avec une attitude agréable et une capacité d’écoute : en d’autres termes, le comportement qui permettra d’établir un climat de respect et de confiance. Les propriétaires évalueront l’environnement et l’équipement de la clinique vétérinaire mais également sa fiabilité et sa crédibilité professionnelle. Il faut rappeler que même si la clinique véhicule une image très professionnelle, il suffit d’un comportement inadapté pour que le client passe de l’idée d’ami à celle d’ennemi, et que la fidélité acquise au fil du temps et des efforts soit perdue.
Une fois la première étape franchie, il faut garder à l’esprit certains facteurs qui régissent les interactions humaines, et a fortiori la relation vétérinaire-propriétaire. Comme dans toutes les relations, quand les rôles ne sont pas équivalents, celui qui a le rôle principal (dans le cas présent, le vétérinaire) doit gérer la relation avec l’autre (le propriétaire), en utilisant le dialogue comme un instrument. Le mode de communication principal doit donc être assertif (affirmatif), à l’aide d’une voix claire, amicale et calme, de gestes ouverts et d’un contact visuel direct (Figure 4). L’interlocuteur doit adopter une posture droite, détendue et réceptive avec une expression faciale traduisant l’implication et la compassion. Les styles de communication passif ou managérial ne devront être employés que dans les situations critiques : ces deux modes sont utiles pour gérer un individu difficile, comme par exemple un propriétaire agressif, nerveux, distrait, arrogant, sceptique ou peu coopératif. Il est essentiel de comprendre et de maîtriser ces styles pour en faire des outils de persuasion ou d’orientation. Si tous ces modes de communication ne sont pas complètement maîtrisés, il vaut mieux maintenir une relation assertive et impliquer l’autre en lui posant des questions pour obtenir sa coopération grâce à des propositions de réponse. Les propriétaires possèdent généralement les informations qui permettront au vétérinaire de recueillir une anamnèse détaillée mais ils ne les donnent pas toujours, pour des raisons parfois obscures. Ils ont plutôt tendance à donner des détails déformés par leur perception de la réalité.
Face à un propriétaire qui nourrit mal son animal (surtout si le propriétaire ou des membres de sa famille sont également en surpoids), une communication efficace est essentielle, à la fois pour établir le diagnostic et pour convaincre le propriétaire d’appliquer le traitement approprié. Dans ce cas, le dialogue ne doit pas consister à poser des questions ouvertes (du style « à quel moment et avec quoi nourrissez-vous votre animal ? ») mais plutôt à utiliser des propositions couplées pour cibler et identifier le comportement du propriétaire (« nourrissez-vous votre chien à heures fixes, ou y a-t-il toujours quelque chose dans sa gamelle ? » « mange-t-il toujours seul ou avec vous et votre famille ? »). En communiquant de cette manière, le vétérinaire peut faire comprendre au propriétaire qu’il existe différentes manières de nourrir un animal, et ensuite insister sur celles qui sont négatives. L’objectif de cette forme de communication est de permettre aux propriétaires de découvrir de quelle manière ils se conduisent avec leur animal. Ils peuvent ainsi comprendre qu’ils génèrent eux-mêmes des situations inappropriées susceptibles de créer le problème ou d’empêcher sa résolution.
Une fois que le propriétaire a répondu aux questions, il est utile de vérifier l’exactitude des informations en utilisant des phrases telles que : « Ai-je bien compris que…, puis-je confirmer que vous nourrissez votre..., d’après ce que vous m’avez dit, il semblerait que...., etc. ». Il y a certains avantages à passer ainsi en revue les informations collectées, comme celui de créer une alliance avec le propriétaire et de le faire participer à la compréhension du problème, ainsi que celui de lui donner l’opportunité d’analyser le problème sous un angle différent, grâce aux propositions de réponse. Cela permet aussi de consolider la relation entre le vétérinaire et le propriétaire, car ce résumé des faits montre l’intention de vérifier que le problème a été bien cerné, et donc le souhait du vétérinaire d’avoir une compréhension complète de la situation. En d’autres termes, cela renforce l’idée que le vétérinaire fait preuve de professionnalisme et qu’il agit comme un ami concerné par le problème.
Si le propriétaire, réalisant que son animal en surpoids ou obèse a un problème grave, se tourne vers le vétérinaire pour lui demander de l’aide, il est probable qu’il suivra ses instructions. A l’inverse, si le propriétaire ne réalise pas que son animal souffre d’une affection potentiellement dangereuse, et que c’est le vétérinaire qui pointe le problème du doigt et indique ce qu’il faut faire, il y a des risques que ses instructions ne soient pas appliquées.
C’est dans ces circonstances que le langage occupe une place stratégique dans l’efficacité des prescriptions nutritionnelles. Comme chez l’Homme, la prise en charge nutritionnelle des animaux fait appel à la motivation, la volonté d'atteindre des objectifs, la tentative de ressentir un nouveau bien-être, les principes moraux, l’envie de plaisir… Le bon sens, la réflexion logique et les instructions d’un vétérinaire ne suffisent pas toujours à changer les comportements d’un propriétaire vis-à-vis de son animal. Il est très souvent nécessaire d’éveiller des sensations, des émotions et des sentiments pour créer chez l’autre la motivation nécessaire au changement de ses comportements. Parfois, l’inconscient a besoin d’être stimulé pour favoriser le changement… L’inconscient peut être défini comme la partie non rationnelle et non consciente de l’être humain, mais génératrice de sensations souvent à l’origine de nos actions. Face à une certaine situation, quelqu’un pourrait par exemple dire : « je ne sais pas pourquoi mais j’ai eu envie de le faire… », « j’ai agi instinctivement, mais a priori tant mieux… ». Il peut être nécessaire de favoriser ces choix inconscients chez le propriétaire d’un animal obèse ; par exemple, l’utilisation de métaphores, d’anecdotes et de paraboles (langage de l’inconscient) peut être un bon moyen de déclencher ces sensations et de permettre à l’auditeur de percevoir certains comportements comme favorables ou défavorables (voir l’encadré ci-dessous).
L’utilisation de métaphores, anecdotes et paraboles peut aider l’interlocuteur à percevoir certains schémas comportementaux comme favorables ou défavorables. Par exemple, on peut utiliser la métaphore suivante pour expliquer les conséquences de la suralimentation : |
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Imaginez que vous êtes un jeune garçon en train de marcher sur un chemin de montagne avec ses parents et quelques amis. Vous portez un sac sur le dos, et juste après votre départ, un de vos parents vous montre une magnifique pierre toute brillante. Il la trouve tellement belle qu’il la met dans votre sac à dos. Chemin faisant, il trouve d’autres belles pierres, et les place de nouveau dans votre sac, sans que vous ayez la possibilité de le vider. Comment vous sentirez-vous après quelques heures de marche et à la fin de la journée ? Donner trop à manger à un animal, et au mauvais moment, c’est comme remplir votre sac à dos ! |
Pour que les instructions puissent porter leurs fruits, il faut donc que le propriétaire soit convaincu. Il est important de connaître certaines des grandes règles sociales qui permettent de persuader quelqu’un de faire quelque chose. Bien utilisées, ces règles aident le vétérinaire à convaincre le propriétaire qu’un ensemble d’instructions doivent être appliquées pour le bien-être de l’animal.
Références complémentaires
German AJ, Holden SL, Bissot T, et al. Dietary energy restriction and successful weight loss in obese client-owned dogs. J Vet Intern Med 2007;21:1174-1180.
Franco Favaro
Franco Favaro, Centre des Sciences Comportementales Canines (CSC), Legnaro, Italie En savoir plus
Serena Adamelli
Centre des Sciences Comportementales Canines (CSC), Legnaro, Italie En savoir plus
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