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Veterinary Focus

Numéro du magazine 33.3 Autre scientifique

Anesthésie des animaux âgés

Publié 08/03/2024

Ecrit par Kate White et Flo Hillen

Aussi disponible en Deutsch , Italiano , Español , English et Українська

Les vétérinaires doivent fréquemment anesthésier des animaux âgés. Les auteures font ici l’état des lieux sur les connaissances actuelles en la matière, en privilégiant les moyens d’assurer la sécurité des animaux.

Chihuahua

Points clés

L’augmentation de l’espérance de vie des animaux de compagnie implique que les chirurgiens vétérinaires doivent maintenant fréquemment pratiquer une anesthésie générale et opérer des individus âgés.


Bien que l’âge ne soit pas une maladie, les modifications liées au vieillissement réduisent la réserve fonctionnelle des organes, ce qui signifie que les animaux âgés, même s’ils sont en bonne santé, sont moins aptes à faire face au stress physiologique.


Chez les animaux âgés, l’anesthésie doit tenir compte de la prévalence accrue de maladies cliniques et subcliniques.


Bien comprendre la façon dont les changements physiologiques et physiopathologiques peuvent affecter l’anesthésie aide le clinicien à prendre des décisions en faveur du confort et de la sécurité de l’animal.


Introduction

L’augmentation de l’espérance de vie des animaux de compagnie, couplée au fait que les propriétaires prennent davantage soin de leur santé, implique que des chiens et des chats âgés sont plus fréquemment présentés à la consultation vétérinaire qu’autrefois, et qu’ils doivent parfois subir une anesthésie générale avant une procédure chirurgicale ou diagnostique. Un animal est généralement considéré comme âgé quand il a dépassé 75 à 80 % de son espérance de vie théorique ; il faut cependant interpréter ce seuil avec une certaine prudence car l’espérance de vie moyenne est en partie due aux prédispositions raciales plutôt qu’à une simple variation du vieillissement biologique 1. Il est pourtant peu probable qu’un jeune animal atteint d’une maladie susceptible d’abréger sa longévité soit physiologiquement comparable à un individu âgé. En général, les animaux qui semblent vieux devraient probablement être considérés comme tels, et si cela semble en décalage par rapport à leur âge réel, il faut en explorer les raisonsIl est pourtant peu probable qu’un jeune animal atteint d’une maladie susceptible d’abréger sa longévité soit physiologiquement comparable à un individu âgé. En général, les animaux qui semblent vieux devraient probablement être considérés comme tels, et si cela semble en décalage par rapport à leur âge réel, il faut en explorer les raisons.

Qu’il s’agisse d’un humain ou d’un animal, vieillir en bonne santé n’empêche pas que des changements surviennent et entraînent une réduction des réserves physiologiques ; les animaux âgés sont plus susceptibles d’être affectés par des maladies cliniques et subcliniques devant être prises en compte avant une anesthésie. Une analyse rétrospective multicentrique a montré que l’âge est à lui seul un facteur de risque pour la mortalité peropératoire : les chiens et les chats apparemment en bonne santé âgés de plus de 12 ans présentent respectivement un risque multiplié par 10 et 2,1 de mourir de complications liées à l’anesthésie par rapport à leurs congénères plus jeunes 2. Cette fragilité accrue résulte probablement d’une plus grande sensibilité aux effets des médicaments anesthésiques liée à la diminution des réserves fonctionnelles ; l’hypothermie, l’allongement de la période de récupération et l’incidence accrue des maladies subcliniques sont aussi en cause.

Évolutions physiologiques liées à l’âge 

Système respiratoire

À l’intérieur des poumons, les petites voies aériennes (c’est-à-dire celles dont le diamètre est inférieur à 2 mm) se ferment lorsque le volume pulmonaire est faible, stoppant la circulation de l’air vers ou à partir des alvéoles correspondantes ; chez un animal âgé, le seuil volumique déclenchant la fermeture est plus élevé que chez un animal plus jeune. Bien que la fibrose pulmonaire et l’affaiblissement des muscles respiratoires d’un animal âgé entraînent une augmentation de la capacité résiduelle fonctionnelle (CRF), la capacité de fermeture (le volume maximal d’air dans les poumons à partir duquel la fermeture des petites voies aériennes peut être détectée) augmente également avec la perte de l’élasticité. Avec le temps, la capacité de fermeture dépasse la CRF 3. L’atélectasie et l’inadéquation entre la ventilation et la perfusion qui en résulte entraînent une augmentation du gradient alvéolo-artériel en oxygène, ce qui fait donc baisser la pression partielle de l’oxygène dans le sang artériel. En conséquence, un animal âgé est plus susceptible de présenter une désaturation rapide et il réagit moins bien à l’hypoxie et à l’hypercapnie.

Système cardiovasculaire

Un animal âgé dispose de moins de réserves cardiovasculaires et il est donc moins capable de répondre à l’hypotension. Le flux sanguin vers les organes, incluant le foie et les reins, peut aussi diminuer avec l’âge, ce qui accroît le risque de troubles ischémiques. Même chez un individu ne présentant pas de pathologie cardiovasculaire spécifique, l’âge induit une atrophie et une fibrose du myocarde, une fibrocalcification valvulaire et un épaississement ventriculaire. L’atteinte valvulaire peut conduire à des degrés divers d’insuffisance cardiaque, tandis qu’une altération du système de conduction peut prédisposer les animaux au développement d’une arythmie.

À cause de la perte d’élasticité du cœur et de l’hypertrophie ventriculaire, le débit cardiaque dépend de plus en plus des contractions auriculaires pour le remplissage ventriculaire. Chez un animal âgé, les barorécepteurs fonctionnent aussi moins bien et, alors que la diminution du tonus vagal entraîne une augmentation de la fréquence cardiaque au repos, celle-ci est moins susceptible de s’élever en cas d’hypotension. Le maintien d’un volume systolique adéquat dépend par conséquent d’une précharge ou d’un volume diastolique final suffisants. 

L’incidence des maladies cardiovasculaires cliniques augmente avec l’âge. La maladie valvulaire mitrale est particulièrement fréquente chez le chien : 25 % des chiens âgés de 9 à 12 ans et 33 % des chiens âgés de plus de 13 ans présenteraient un certain degré d’atteinte de la valve mitrale 4. Chez un individu présentant une régurgitation valvulaire, le myocarde doit travailler davantage pour maintenir le débit cardiaque ; cela entraîne une augmentation du besoin en oxygène et favorise l’hypoxie myocardique, ainsi que le développement d’une arythmie. Chez le chat, la myocardiopathie hypertrophique (MCH) est la maladie la plus fréquente : elle affecte environ 15 % de la population et l’incidence augmente avec l’âge 5. Les animaux atteints de MCH sont exposés au risque d’obstruction de la chambre de chasse du ventricule gauche, à l’hypoxie myocardique et aux arythmies. 

Système rénal

Une perte de fonction rénale est associée à l’âge. L’évolution dégénérative du système cardiovasculaire entraîne une diminution du flux sanguin rénal, bien que le débit de filtration glomérulaire (DFG) reste stable chez certains sujets âgés en bonne santé 6,7. Ces modifications hémodynamiques s’accompagnent d’une réduction de la masse rénale résultant de la perte de glomérules et de néphrons, ce qui entraîne une réduction de la réserve fonctionnelle. 

L’homéostasie des fluides et des électrolytes est également altérée chez les animaux âgés. À cause de la dégénérescence des tubules rénaux et de la diminution de la réponse à l’hormone antidiurétique, la capacité rénale à concentrer l’urine diminue, ainsi que la teneur en eau de l’organisme. Ces animaux peuvent également moins bien tolérer une surcharge volumique car leur capacité à éliminer l’excès d’eau dans l’urine est réduite en raison d’une moindre capacité des reins à excréter le sodium en réponse aux variations de pression et du volume sanguins. Ce phénomène peut être exacerbé par des affections courantes telles que la maladie rénale chronique (MRC), qui peut perturber l’excrétion du sodium, et l’insuffisance cardiaque congestive (ICC).

Une capacité réduite à excréter les ions hydrogène est également connue chez les individus âgés, ce qui favorise le développement d’une acidose métabolique aiguë. Le risque est encore augmenté chez ceux qui présentent une maladie pulmonaire concomitante, qui empêche de mettre en place des mécanismes compensateurs efficaces. 

Système hépatique

Le vieillissement est associé à une diminution de la masse du foie, à un épaississement des cellules endothéliales sinusoïdales et à une réduction du flux sanguin hépatique. Une étude récente suggère que les niveaux médians des enzymes hépatiques (alanine transaminase et phosphatase alcaline) augmentent légèrement chez les animaux âgés en apparente bonne santé, indiquant peut-être une maladie subclinique 8. Le métabolisme hépatique des médicaments dépend du flux sanguin, de leur liaison aux protéines plasmatiques et de leur distribution dans l’espace périsinusoïdal. Une baisse de l’efficacité thérapeutique peut par conséquent être observée chez un animal âgé car les systèmes enzymatiques hépatiques reçoivent une quantité plus faible du médicament. L’altération de la fonction hépatique peut également provoquer une augmentation du temps de coagulation, une baisse de l’immunité, une hypoalbuminémie, une hypocholestérolémie et des troubles du métabolisme du glucose. La diminution de la capacité à stocker le glucose sous forme de glycogène prédispose par exemple les animaux âgés à l’hypoglycémie. 

Système nerveux 

Les modifications du système nerveux central et périphérique liée à l’âge augmentent la sensibilité aux médicaments anesthésiques. Bien que la physiopathologie sous-jacente soit encore à explorer, des études menées chez des personnes âgées suggèrent que la concentration alvéolaire minimale (CAM) en anesthésiques volatils diminue avec l’âge 9 et que la dose de médicament anesthésique à administrer par voie intraveineuse pourrait aussi être réduite. 

Le déclin cognitif postopératoire est bien connu chez les personnes âgées : il est attribué à l’apoptose neuronale, à la neurodégénérescence et à l’accumulation de bêta-amyloïde. Des études suggèrent que les anesthésiques volatils et certains agents injectables, notamment le midazolam et la kétamine, puissent jouer un rôle 10. Les épisodes ischémiques affectant le système nerveux central peuvent également entraîner la mort cellulaire. Bien que ce phénomène n’ait pas été décrit en médecine vétérinaire, il pourrait aussi représenter un facteur de risque chez les animaux de compagnie. 

Il faut enfin rappeler que les animaux âgés sont plus sensibles au stress ; ils sont plus difficiles à manipuler lorsqu’ils présentent des degrés divers de cécité et de surdité, ainsi que des maladies neurologiques liées à l’âge, telles que le dysfonctionnement cognitif canin et la perte des comportements acquis. Un environnement hospitalier inconnu peut exacerber ce phénomène, entraînant confusion, désorientation et comportements erratiques. Une perte d’odorat peut aussi entraîner une baisse de l’appétit ou une aversion pour des aliments nouveaux ; ceci doit être pris en compte en réalimentant les animaux après l’opération.

Système digestif 

La capacité à digérer les macronutriments est probablement peu modifiée chez le chien âgé mais elle peut baisser chez le chat, même en l’absence de maladie clinique. L’importance de ce phénomène reste cependant floue car les animaux affectés ont tendance à compenser en augmentant leur consommation alimentaire 11. Des troubles intestinaux chroniques sont fréquents chez les animaux âgés et peuvent entraîner une malabsorption et un risque de carences nutritionnelles. Ces problèmes peuvent avoir des conséquences sur l’anesthésie, par exemple lorsqu’une carence grave en cobalamine entraîne une anémie. 

Chez le chien âgé, la fréquence des reflux gastro-œsophagiens pendant l’anesthésie semble augmenter avec l’âge 12. Associé à un pH gastrique bas, ce phénomène est un facteur de risque d’œsophagite postopératoire. 

Système musculosquelettique 

La prévalence des troubles musculosquelettiques tels que les maladies articulaires dégénératives et la spondylose déformante augmente chez les animaux âgés, qui souffrent souvent de douleurs chroniques. Ces douleurs peuvent être exacerbées par de longues périodes de décubitus ou d’immobilité forcée pendant les examens d’imagerie ou la chirurgie. La douleur stimule alors le système sympathique.

Bilan préopératoire

L’état de santé influence les risques de morbidité et de mortalité peropératoires. Un examen préopératoire s’impose donc pour les animaux devant subir une anesthésie générale afin d’identifier un protocole anesthésique adapté à leur état, prévenir les complications potentielles et informer les clients. L’évaluation minimale consiste à faire une anamnèse et un examen clinique approfondis, qui pourraient révéler une affection non diagnostiquée auparavant. Le clinicien doit savoir si l’animal reçoit des médicaments car cela peut avoir une incidence sur l’anesthésie. Les propriétaires ne font pas toujours la différence entre les effets normaux du vieillissement et des signes pathologiques ; il est donc important de leur apprendre à le faire 13 et il en sera tenu compte dans l’anamnèse. Chez l’homme, des antécédents d’intolérance à l’effort et de mauvaises performances lors des tests standards sont associés à des complications peropératoires et à un mauvais pronostic 14. L’évaluation de l’activité physique des animaux peut également aider à juger de leur capacité à faire face aux stress physiologiques induit par l’anesthésie générale.

Bien qu’un bilan sanguin de routine ne soit aujourd’hui généralement pas justifié dans le cadre du dépistage préopératoire, il peut cependant être indiqué pour un animal âgé susceptible de présenter des maladies subcliniques 15,16 (Figure 1). Même si l’animal est en bonne santé, l’âge est responsable de différences hématologiques et biochimiques et les résultats seront donc comparés à des valeurs de référence formulées pour les animaux âgés si elles sont disponibles. Sinon, l’âge sera pris en compte au moment d’interpréter les résultats. Un individu âgé en bonne santé peut par exemple présenter une diminution de l’hématocrite, du volume corpusculaire moyen et de la concentration en fer sérique, ainsi qu’une augmentation de la numération plaquettaire. Sur le plan biochimique, les protéines totales, les globulines et l’urée peuvent être augmentées tandis que l’albumine est souvent diminuée 8. Bien que l’activité enzymatique hépatique soit souvent stable ou légèrement augmentée, la possibilité d’un dysfonctionnement hépatique (comme indiqué ci-dessus) demeure. En cas d’hypoglycémie, d’hypoalbuminémie ou d’hypocholestérolémie, des examens complémentaires seront justifiés, comme un test de stimulation des acides biliaires et des tests de coagulation, incluant le temps de prothrombine et le temps de céphaline activée.

Vétérinaire faisant un prélèvement sanguin sur un chat

Figure 1. Prise de sang préopératoire chez un chat de 15 ans.
© Kate White

L’azotémie (pré)rénale est plus fréquente chez les animaux âgés mais n’apparait généralement que lorsque l’atteinte rénale dépasse les 75 %. Lorsqu’il existe des signes d’azotémie, ils doivent donc être interprétés en conjonction avec la densité urinaire.

Les antécédents de l’animal, les observations cliniques, l’évaluation de la tolérance à l’effort et les résultats des examens de laboratoire peuvent servir à classer le niveau de risque sur une échelle de 1 à 5, selon la classification de l’American Society of Anesthesiologists (ASA) (Tableau 1). Cette classification est largement utilisée en médecine humaine pour évaluer l’état physiologique du patient et prévenir les complications anesthésiques. La classification ASA ne prend en principe pas l’âge en compte mais, compte tenu des différences de réserves physiologiques entre les animaux très jeunes et très âgés, ce critère est utilisé en pratique par de nombreux cliniciens : soit ils l’envisagent indépendamment du système de classification, soit ils classent systématiquement un animal âgé au niveau ASA II, même s’il est en bonne santé. En cas de comorbidité, il peut être justifié de stabiliser l’état de l’animal en préopératoire afin de réduire le risque anesthésique ; une azotémie prérénale sera par exemple corrigée avant l’opération pour réduire le risque d’hypotension pouvant conduire à une nécrose tubulaire aiguë.

Tableau 1. État de santé selon la classification ASA.

Stade* Définition Exemples mais liste non-exhaustive :
I Animal normal et en bonne santé
  • Animal en bonne santé (non brachycéphale avec une note d’état corporel normale), sans affection sous-jacente, présenté pour une intervention non-urgente telle qu’une stérilisation ou la réduction d’une fracture simple.
II Animal souffrant d’une maladie systémique légère (mais la compensant bien)
  • Anémie légère (hématocrite : 30-40 % chez le chien, 25-30 % chez le chat)
  • Animal brachycéphale considéré comme sain
  • Souffle cardiaque (grade 1-2/6) avant un bilan cardiaque complet/avec une maladie cardiaque connue
  • Légère déshydratation (4-6 %)
  • Endocrinopathie stable
  • Épilepsie contrôlée
  • Affection gastro-intestinale légère/stable
  • Infection légère/localisée 
  • Obésité
III Animal souffrant d’une maladie systémique grave (ne la compensant pas complètement)
  • Anémie modérée (hématocrite : 20-30 % chez le chien, 15-25 % chez le chat)
  • Animal brachycéphale avec des signes respiratoires/gastro-intestinaux légers
  • Arythmie cardiaque dont les symptômes sont maîtrisés
  • Maladie cardiaque contrôlée/compensée
  • Souffle cardiaque (grade 3/6) avant un bilan cardiaque complet/avec une maladie cardiaque connue
  • Déshydratation modérée (7-9 %)
  • Endocrinopathie non contrôlée/instable
  • Épilepsie non contrôlée/instable
  • Maladie gastro-intestinale non contrôlée/instable
  • Maladie hépatique contrôlée/compensée
  • Infection modérée/sévère/généralisée (pyomètre par exemple)
  • Maladie pulmonaire contrôlée/compensée
  • Pyrexie
  • Maladie rénale contrôlée/compensée
  • Animal très jeune/nouveau-né (< 12 semaines) mais en bonne santé
 IV Animal atteint d’une maladie systémique grave qui menace le pronostic vital
  • Anémie sévère (hématocrite < 20 % chez le chien, < 15 % chez le chat)
  • Animal brachycéphale avec signes respiratoires/gastro-intestinaux modérés/sévères
  • Arythmie cardiaque sévère/non contrôlée
  • Maladie cardiaque décompensée
  • Souffle cardiaque (grade 4-6/6)
  • Déshydratation sévère (≥ 10 %)
  • Acidocétose diabétique
  • Dyspnée
  • Maigreur
  • Endotoxémie
  • Épilepsie – crise épileptique
  • Maladie hépatique non contrôlée/instable
  • Maladie à médiation immunitaire (par exemple, anémie hémolytique, thrombocytopénie)
  • Maladie pulmonaire non contrôlée/instable
  • Maladie rénale non contrôlée/instable
  • Choc grave (par exemple, hypovolémique, hémorragique)
  • Syndrome de réponse inflammatoire systémique
  • Urémie
  • Obstruction urinaire
 V Animal moribond dont la survie dépend de l’opération
  • Maladie cardiaque sévère/décompensée
  • Coagulopathie intravasculaire disséminée
  • Endotoxémie sévère/décompensée
  • Dilatation-torsion de l’estomac 
  • Maladie hépatique sévère/décompensée
  • Hémorragie intracrânienne
  • Dysfonctionnement organique multiple
  • Maladie rénale avancée/décompensée
  • Traumatisme grave
  • Choc grave/décompensé (par exemple, hypovolémique, hémorragique)
  • Maladie tumorale maligne/métastatique en phase terminale
L’ajout de la lettre « E » au stade indique un niveau d’urgence extrême : un retard dans le traitement de l’animal entraînerait une augmentation significative du risque de décès ou menacerait l’intégrité d’une partie du corps.
Les énumérations ci-dessus sont indicatives : elles visent à aider le vétérinaire à évaluer le stade ASA d’un animal avant une anesthésie. Ce système de classement est très subjectif et ces indications ne doivent pas se substituer au jugement clinique lors de la préparation de l’animal à l’anesthésie.

* American Society of Anesthesiologists (ASA) : Système de classification de l’état de santé 

D’après : Daniel Cripwell, BSc (Hons), BVSc, CertAVP (EM), PgCert (VPS), MRCVS ; Alex Dugdale, MA, VetMB, DVA, Dip. ECVAA, PhD, PGCert (LTHE), FHE, MRCVS ; Joanne Michou, MA, VetMB, Dip. ECVAA, MRCVS, 1321 Burlington Street Suite D, North Kansas City, MO, 64116, États-Unis (www.jurox.com/us).

 
Kate White

Les animaux âgés présentent fréquemment des troubles musculosquelettiques tels que des maladies articulaires dégénératives ou une spondylose déformante, qui entraînent des douleurs chroniques. De longues périodes de décubitus ou d’immobilité forcée pendant les examens d’imagerie ou la chirurgie peuvent aggraver ces douleurs et stimuler le système sympathique.

Kate White

Prémédication et analgésie

Comme indiqué ci-dessus, un animal âgé sera plus facilement anxieux dans un environnement hospitalier et il est donc nécessaire de le manipuler avec précaution pour limiter son stress. Idéalement, un accès intraveineux sera mis en place dès l’admission à la clinique mais, chez un animal anxieux ou agressif, une sédation préalable peut être nécessaire. Il peut alors être conseillé de demander au propriétaire d’administrer un sédatif léger ou un anxiolytique avant l’admission ; des données soutiennent l’utilisation de la gabapentine (10-20 mg/kg chez le chien, 10 mg/kg chez le chat), du trazadone (2-10 mg/kg chez le chien, 5-10 mg/kg chez le chat [soit en général un comprimé de 50 mg]) ou de l’alprazolam (0,01-0,1 mg/kg chez le chien, 0,125-0,25 mg/kg chez le chat) 17,18. Ces médicaments peuvent être administrés seuls ou en association et, bien qu’ils fassent légèrement baisser la pression artérielle, ils sont plus recommandés chez les animaux âgés que l’administration orale de dexmédétomidine ou d’acépromazine qui entraînent une dépression cardiovasculaire plus marquée.

Chez les animaux arthrosiques, la flexion et l’extension des articulations lors de la contention pour la pose de cathéters intraveineux peuvent provoquer une douleur importante. Dans ce cas, le cathéter sera placé dans la veine périphérique la moins susceptible d’obliger l’animal à rester dans une position inconfortable. Chez un chien haut sur pattes, le cathéter pourra être placé en position debout, l’animal pesant sur ses quatre membres, afin d’éviter la flexion et l’extension articulaire (Figure 2). 

Vétérinaire installant une intraveineuse sur un chien

Figure 2. Mise en place d’un cathéter intraveineux chez un Dogue de Bordeaux de 8 ans présentant des antécédents d’arthrose, en évitant la flexion ou l’extension du coude.
© Kate White

L’animal sera en principe mis à la diète avant l’anesthésie mais un chien ou un chat âgé peuvent ne pas bien le tolérer car leurs réserves de glycogène hépatique sont faibles. Il est préférable de ne pas dépasser 6 heures de jeûne chez ces animaux mais ceux qui souffrent de troubles gastro-intestinaux peuvent présenter un temps de transit plus lent et un risque accru de vomissement. De plus, les animaux âgés présentent généralement un risque plus élevé de régurgitation. Il est donc nécessaire de les surveiller attentivement après avoir administré la prémédication. De l’oméprazole pourra être donné à titre préventif (1 mg/kg IV/PO pour les animaux susceptibles de régurgiter) et ceux qui risquent de vomir recevront un antiémétique tel que le maropitant (1 mg/kg SC/IV/PO) ou l’ondansétron (0,5 mg/kg IV). Retirer l’eau 30 minutes avant l’induction ou au moment de la prémédication suffit en principe à prévenir le risque de déshydratation chez les animaux incapables de tolérer une déplétion volumique même minime.

Quel que soit l’âge de l’animal, les objectifs de la prémédication sont de limiter l’anxiété, faciliter la manipulation, installer l’analgésie, limiter les doses de médicaments lors de l’induction et de l’anesthésie gazeuse, et permettre un réveil en douceur après l’anesthésie. L’association médicamenteuse utilisée, la dose et la voie d’administration dépendent de l’animal, des morbidités existantes et du type d’intervention mais certaines spécificités des animaux âgés sont aussi importantes à considérer. La probabilité d’une hypotension ou du développement d’une arythmie peut être plus élevée chez ceux qui présentent une affection clinique, surtout lorsque le système de conduction est impliqué ou qu’il y a un risque d’hypoxie du myocarde. Même en l’absence de trouble clinique, les animaux âgés ont une réserve cardiovasculaire moindre et une faible capacité à réagir à l’hypotension. Par conséquent, les médicaments arythmogènes ou ceux qui ont des effets inotropes négatifs seront évités chez certains animaux et utilisés avec prudence chez d’autres. Lorsque des médicaments aussi courants que les alpha-2 agonistes (médétomidine, dexmédétomidine) et l’acépromazine sont utilisés en prémédication chez un sujet âgé, la dose administrée devra souvent être plus faible que chez un animal jeune.

L’insuffisance rénale et hépatique chez les animaux âgés peuvent affecter le métabolisme et l’excrétion des agents injectables. L’élimination rénale des médicaments peut par exemple être plus longue chez un animal dont le DFG est réduit, ce qui prolonge leur durée d’action. Les médicaments qui traversent la barrière hémato-encéphalique (ce qui est le cas de la plupart des anesthésiques) sont liposolubles et sont donc métabolisés par le foie ; chez les animaux ayant une fonction hépatique réduite, ce processus peut être inefficace. L’hypoalbuminémie et l’acidose observées chez certains animaux affectent également la fixation des médicaments sur les protéines, mais cela n’entraîne pas nécessairement une augmentation significative de la concentration plasmatique de la forme libre, ni de la toxicité, car le volume de distribution est également modifié. Par conséquent, les effets de l’injection de prémédication sont en général moins prévisibles ; la prudence est de mise quant au dosage, et mieux vaut répéter l’administration en se basant sur les besoins réels plutôt qu’à intervalle fixe.

La prémédication vise à mettre en place une analgésie lors de procédure douloureuse mais des médicaments supplémentaires sont nécessaires dans de nombreux cas. Une approche multimodale est souvent appropriée pour réduire la stimulation sympathique et la douleur postopératoire. Cette approche peut inclure une anesthésie locorégionale (Figure 3) et l’administration peropératoire (en bolus ou en perfusion à débit constant) d’opioïdes, de kétamine ou de lidocaïne, ainsi que d’anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS). L’utilisation peropératoire des AINS exige cependant une prudence particulière en cas d’insuffisance rénale connue ou de risque d’hypotension. Chez un animal âgé, l’analgésie peut être indiquée même si la procédure n’est normalement pas douloureuse : par exemple chez des animaux souffrant de douleurs chroniques d’origine arthrosique, qui peuvent être aggravées par la position requise pendant l’intervention chirurgicale ou les examens radiographiques. 

Piqûre réalisée sur un Yorkshire Terrier

Figure 3. Anesthésie locorégionale du nerf alvéolaire inférieur chez un Yorkshire Terrier de 9 ans avant des extractions dentaires.
© Kate White

Préoxygénation

Les animaux âgés sont plus sensibles à l’hypoxémie lors de l’induction et moins capables d’en supporter les effets. La préoxygénation les protège car elle augmente la réserve alvéolaire en oxygène, qui remplace progressivement l’azote de la CRF. Il est habituellement recommandé d’administrer de l’oxygène pur au moyen d’un masque facial et d’un dispositif respiratoire, ou en utilisant le flow-by. Si l’animal le tolère, l’utilisation du masque est préférable (Figure 4) : cette méthode s’est avérée plus efficace pour augmenter le temps de désaturation 19. Il est important de veiller à ce que l’oxygénothérapie dure assez longtemps, surtout s’il s’agit d’un animal âgé, car des études en médecine humaine suggèrent que le temps nécessaire à l’élimination suffisante de l’azote est significativement plus long chez une personne âgée que chez un patient jeune 20.

Un chihuahua avec un masque à oxygène

Figure 4. Pré-oxygénation d’un Chihuahua de 12 ans avant induction de l’anesthésie.
© Jess Trueman

Fluidothérapie intraveineuse

L’hypotension est une conséquence fréquente de l’anesthésie générale et, chez un animal âgé dont la réserve fonctionnelle est diminuée, il existe un risque particulier de dysfonctionnement organique ultérieur causé par l’ischémie. Dans le même temps, la dépendance au volume d’éjection systolique pour maintenir un bon débit cardiaque exige une précharge adéquate mais l’affaiblissement des baroréflexes signifie que l’animal est moins apte à réagir à une pression artérielle basse. Une fluidothérapie intraveineuse sera donc généralement mise en place avant l’anesthésie des animaux âgés et poursuivie pendant la période de réveil (Figure 5). Les animaux âgés tolèrent cependant mal la surcharge volumique et leur teneur corporelle en eau est réduite ; il convient donc d’être prudent et de prendre en compte les comorbidités telles que l’ICC et la MRC. Une surcharge volumique peut favoriser le développement d’une ICC et d’un œdème tissulaire, entraînant ainsi une réduction de la perfusion, une altération de la circulation de l’oxygène dans les poumons, une motilité gastro-intestinale diminuée, une baisse de l’hémostase (en raison de l’altération des facteurs de coagulation), et un retard à la cicatrisation des plaies.

Chez la plupart des animaux, un soluté cristalloïde équilibré est généralement approprié. La vitesse d’administration sera adaptée aux besoins de l’animal mais elle se situe généralement entre 2 et 5 mL/kg/heure. Des bolus de 10 à 15 mL/kg chez le chien et de 5 à 8 mL/kg chez le chat peuvent être utilisés pour traiter l’hypotension ou l’hypovolémie.

Chien sur une table d'opération avec une machine de fluidothérapie intraveineuse (IVFT)

Figure 5. Chez un animal âgé, la fluidothérapie intraveineuse est généralement mise en place avant l’anesthésie et poursuivie pendant la période de réveil. Ici un soluté de Hartmann est administré (à raison de 5 mL/kg/heure) à un Staffordshire Bull Terrier de 28 kg, âgé de 13 ans et présentant un hyperadrénocorticisme.
© Jess Trueman

Induction de l’anesthésie

La plupart des agents inducteurs de l’anesthésie administrables par voie parentérale conviennent aux animaux âgés ; le choix est souvent basé sur l’expérience et les habitudes du clinicien. Le propofol, l’alfaxalone, la kétamine et l’étomidate sont utilisables par voie intraveineuse. Tous sont susceptibles de provoquer une dépression respiratoire et cardiovasculaire en fonction de la dose mais, comme le besoin en médicament anesthésique est diminué chez un animal âgé, ils doivent être titrés avec soin pour être efficaces. Une étude faite sur le propofol a mis en évidence un risque d’apnée après l’induction chez les chiens âgés ; les résultats suggèrent que la demi-vie avant élimination est plus longue et que des doses inférieures à celles recommandées dans la fiche technique sont préférables 21. Aucune étude n’existe actuellement à propos de l’usage de l’alfaxalone chez les animaux âgés mais certaines données suggèrent que la réponse des barorécepteurs est relativement bien préservée après administration de ce médicament 22

Chez les sujets présentant une maladie cardiovasculaire non-stabilisée, l’étomidate est souvent considéré comme l’agent inducteur le plus approprié car la dépression cardiovasculaire induite est minimale. Une étude menée chez des patients humains âgés suggère cependant qu’une réduction de la pression artérielle moyenne et de la fréquence cardiaque sont observées, similaires à celles induites par le propofol 23 ; son utilisation est aussi associée à une dépression surrénalienne. La kétamine constitue une alternative judicieuse chez certains animaux car elle peut augmenter le débit cardiaque grâce à son activité sympathicomimétique ; elle doit pourtant être administrée avec prudence chez les sujets âgés car une altération du métabolisme hépatique et de la clairance rénale peut prolonger sa durée d’action. Son utilisation chez les animaux présentant une augmentation de la pression intracrânienne est controversée et elle peut être contre-indiquée chez les animaux présentant une MCH sévère ou une tachycardie.

Les techniques de co-induction impliquant l’administration d’une benzodiazépine associée avec le propofol ou l’alfaxalone ont récemment suscité l’intérêt en médecine vétérinaire. Ces protocoles sont souvent envisagés pour les animaux malades ou âgés parce qu’ils permettent de réduire la dose d’agent inducteur nécessaire. Les données existantes suggèrent toutefois qu’une dose réduite peut ne pas induire la stabilisation espérée au niveau des fonctions cardiovasculaire et respiratoire 24

L’induction de l’anesthésie est une période à risque pour la régurgitation et l’aspiration, et ce risque augmente avec l’âge en raison de la diminution des réflexes 12. Le risque sera limité par une intubation rapide et un gonflage approprié du ballonnet de la sonde endotrachéale, en relevant la tête de l’animal (Figure 6).

Chihuahua avec une sonde endotrachéale

Figure 6. Le risque de régurgitation et d’aspiration lors de l’induction de l’anesthésie augmente avec l’âge. La mise en place rapide d’une sonde endotrachéale et le gonflage du ballonnet permettent de limiter les risques.
© Kate White

Entretien de l’anesthésie

L’isoflurane et le sévoflurane sont deux anesthésiques gazeux appropriés pour entretenir l’anesthésie chez un animal âgé : ils sont peu arythmogènes, ils sont peu métabolisés et leur temps de récupération est court. La solubilité du sévoflurane dans les gaz sanguins est plus faible que celle de l’isoflurane, ce qui permet de faire varier plus rapidement la profondeur de l’anesthésie qu’avec l’isoflurane ; leurs effets sur le système cardiovasculaire sont peu différents et tous deux sont largement préférables à l’halothane. Cependant, étant donné que la CAM de ces anesthésiques volatils est probablement réduite chez les animaux âgés, une attention particulière doit être accordée au protocole d’anesthésie.

Monitoring

La diminution de la réserve fonctionnelle signifie qu’un animal âgé est moins capable de compenser les changements physiologiques induits par l’anesthésie. Une surveillance attentive, tout au long de la période peropératoire, permettra d’identifier rapidement une dépression cardiovasculaire ou respiratoire susceptible d’entraîner des complications, et de réagir de manière appropriée. Les signes cliniques, la pression artérielle (mesurée par une technique invasive ou non), la capnographie, la saturation périphérique en oxygène, l’échocardiographie et la température corporelle sont autant de moyens de surveillance utiles au clinicien. Une attention particulière sera accordée aux animaux présentant une morbidité spécifique qui réduirait encore plus leur capacité à réagir à une dépression cardiovasculaire, ainsi qu’à ceux traités avec des médicaments susceptibles d’exacerber les effets néfastes de l’hypotension. Par exemple, les animaux recevant au long court des AINS, des diurétiques ou des inhibiteurs de l’enzyme de conversion de l’angiotensine, présentent un risque de lésions rénales est très élevé. 

Réchauffement de l’animal

L’anesthésie générale perturbe la thermorégulation et une réduction significative de la température corporelle centrale peut allonger le temps de récupération, stimuler le système sympathique, augmenter la douleur postopératoire et entraîner un retard à la cicatrisation des plaies. À cause d’une modification de la répartition des graisses, d’un ralentissement du métabolisme et d’une faible capacité de thermorégulation, les animaux âgés présentent un risque accru d’hypothermie. Le maintien d’une température ambiante adéquate pendant l’intervention chirurgicale contribuera à atténuer la baisse de la température corporelle pendant l’opération. Une autre option consiste à installer un dispositif filtrant la chaleur et l’humidité, à l’interface du tube endotrachéal et du système d’inhalation (Figure 7) ; ce système permet à l’animal de garder la chaleur en réchauffant et en humidifiant l’air inhalé. Les autres précautions à prendre sont d’utiliser une couverture chauffante (Figure 8), d’éviter de tondre trop largement et de mouiller excessivement le pelage en préparant l’opération, et de vérifier que les liquides administrés par voie intra-abdominale sont réchauffés. Une couveuse peut être utilisée pour les animaux de petite taille au moment du réveil.

Staffordshire Bull Terrier avec un filtre d'échange de chaleur et d'humidité

Figure 7. Utilisation d’un dispositif d’échange de chaleur et d’humidité chez un Staffordshire Bull Terrier de 9 ans atteint d’un pyomètre et subissant une ovariohystérectomie.
© Kate White

Couverture spatiale posée sur un Yorkshire terrier

Figure 8. Couverture de survie placée sur un Yorkshire Terrier âgé avant des extractions dentaires.
© Kate White

Réveil de l’anesthésie

Le réveil est une période à risque 2 et les animaux doivent donc faire l’objet d’une surveillance attentive à ce moment-là. Les préoccupations spécifiques aux animaux âgés incluent l’aggravation postopératoire des douleurs chroniques à cause de la position pendant l’anesthésie, le risque accru de régurgitation, l’hypothermie, l’hypoglycémie et un réveil tardif après administration d’anesthésiques injectables (la masse corporelle réduite entraîne une augmentation de leur concentration plasmatique). Les animaux doivent être observés et traités en cas de régurgitation. Le soin apporté à leur positionnement et la mise à disposition d’un couchage confortable pendant la période de réveil peuvent améliorer le confort de ceux qui souffrent d’arthrose ou de douleurs rachidiennes (Figure 9).

Bouledogue Anglais dormant avec une collerette

Figure 9. Bouledogue Anglais âgé après une ostéotomie de nivellement du plateau tibial (TPLO) : sur un matelas : présence d’un matelas en salle de réveil.
© Molly Cabourn

L’hypothermie peut ralentir la récupération après l’anesthésie, retarder la cicatrisation des plaies et provoquer des frissons. Les animaux sévèrement hypothermiques peuvent également présenter une bradycardie réfractaire aux anticholinergiques tels que l’atropine ou le glycopyrrolate. Les frissons entraînent un inconfort, une libération de catécholamines et favorisent l’hypoxémie à cause d’une augmentation significative du besoin en oxygène 25. Lorsque l’hypoxie constitue un risque particulièrement préoccupant, il est conseillé de réchauffer l’animal avant que ne revienne le réflexe de frisson, et de l’oxygène sera fourni aux animaux qui tremblent au réveil.

Afin d’éviter l’hypoglycémie, un animal âgé se verra proposé de la nourriture et de l’eau dès qu’il est apte à manger et boire en toute sécurité. L’odorat réduit et le stress lié à l’environnement hospitalier peuvent rendre l’animal réticent à consommer un nouvel aliment. Il est préférable de demander au propriétaire d’apporter un peu de l’aliment habituel et d’éventuellement réchauffer le repas pour encourager l’animal à manger.

Flo Hillen

La thermorégulation est altérée pendant une anesthésie générale : une baisse significative de la température corporelle centrale peut retarder la récupération, stimuler le système sympathique, augmenter la douleur postopératoire et entraîner un retard à la cicatrisation des plaies.

Flo Hillen

Conclusion

Bien que les principes de précaution applicables à l’anesthésie soient les mêmes pour les animaux âgés, la sécurité de l’animal sera encore mieux assurée si le clinicien est conscient des changements physiologiques associés à l’âge et qu’il prend les décisions adaptées à la situation. Un examen minutieux de l’animal aidera à identifier des affections cliniques et subcliniques avant d’élaborer un programme anesthésique spécifique pour l’animal. Une surveillance tout au long de la période peropératoire permettra d’identifier et de corriger rapidement les dépressions cardiovasculaire et respiratoire chez les animaux dont la réserve fonctionnelle des organes est réduite et qui ont une faible capacité à faire face au stress physiologique.

Références

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Kate White

Kate White

La Dre White est diplômée de l’université de Cambridge et, après avoir exercé en médecine générale, elle a effectué une résidence en anesthésie En savoir plus

Flo Hillen

Flo Hillen

La Dre Hillen est diplômée de l’Université de Nottingham depuis 2016 En savoir plus

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