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Veterinary Focus

Numéro du magazine 35.1 Oncologie

Réadaptation et soins de soutien aux animaux cancéreux

Publié 14/02/2025

Ecrit par Alexandra Guillén

Aussi disponible en Deutsch , Italiano , Español et English

La plupart des animaux de compagnie atteints d’un cancer tireront bénéfice de soins de réadaptation à un stade quelconque de leur maladie. La mise en œuvre précoce d’un traitement de soutien peut influencer positivement leur qualité et leur espérance de vie.

Un cockapoo atteint d’un hémangiosarcome splénique recevant un traitement à la doxorubicine après une intervention chirurgicale.

Points clés

Dans le cadre des soins prodigués aux animaux cancéreux, il est essentiel d’anticiper les complications liées au traitement du cancer et d’avoir une approche proactive pour gérer la douleur.


La mise en œuvre d’un traitement médical et les modifications apportées au mode de vie dans un contexte de réadaptation impliquent de contrôler régulièrement leur efficacité et leur impact réel sur le bien-être de l’animal.


Il est indispensable d’impliquer le propriétaire dans la prise des décisions concernant l’animal cancéreux et d’entretenir une bonne communication avec lui. 


La médecine intégrative et les modifications nutritionnelles sont de plus en plus reconnues comme utiles pour les animaux cancéreux.


Introduction

Le cancer est une cause importante de mortalité chez le chien adulte : il pourrait être en cause dans 27 % des décès et une tendance similaire est observée chez le chat 1,2. Grâce à de nouvelles techniques facilitant la détection des cancers, le diagnostic s’est évidemment affiné et les nombreuses avancées thérapeutiques récentes permettent de prolonger la vie d’un animal cancéreux. La prise en charge d’une tumeur canine ou féline présente de multiples facettes et nécessite cependant d’individualiser le protocole thérapeutique en se basant sur les antécédents médicaux, le pronostic, les préférences des propriétaires et l’expérience personnelle du praticien. Le traitement vise généralement à contrôler ou à retarder la progression de la maladie en faisant l’ablation chirurgicale des tumeurs ou en inhibant la prolifération cellulaire grâce à la chimiothérapie, la radiothérapie ou l’immunothérapie. Certains cancers peuvent être guéris, mais le traitement des tumeurs avancées ou agressives vise surtout à préserver la qualité de vie de l’animal pendant la phase chronique de la maladie.

Les animaux traités pour un cancer peuvent souffrir des effets secondaires de la maladie elle-même ou de sa gestion, et il est donc très important d’intervenir à temps pour atténuer ces effets et améliorer le bien-être général de l’individu. La réadaptation et les soins de soutien font donc partie intégrante de la prise en charge et peuvent être mis en œuvre à tous les stades, depuis le diagnostic jusqu’à la fin de vie de l’animal.

Alexandra Guillén

Pendant certaines phases de la maladie, les soins de soutien et les soins palliatifs peuvent se compléter ou se chevaucher, mais l’approche doit toujours être centrée sur l’animal.

Alexandra Guillén

Le rôle de la réadaptation 

Chez un chien ou un chat cancéreux, la réadaptation englobe une série d’interventions physiques et médicales visant à améliorer la fonctionnalité, soulager la douleur et protéger la qualité de vie de l’animal avant, pendant et après le traitement (Figure 1). Cet objectif ne pourra être atteint qu’en mettant en œuvre des soins de soutien visant à prévenir ou à réduire les symptômes liés à la tumeur et les effets secondaires du traitement. Du début à la fin de la maladie, les soins peuvent s’appuyer sur l’administration de fluides intraveineux ou de produits sanguins, l’analgésie, l’alimentation assistée et la physiothérapie. 

Lors de chimiothérapie, des antiémétiques sont souvent utilisés pour prévenir les nausées et les vomissements, tandis que des stimulants de l’appétit ou des probiotiques peuvent aider à limiter les diarrhées ou la perte de consistance des selles. Des antibiotiques peuvent également être prescrits pour réduire le risque d’infection secondaire pendant les phases neutropéniques. 

Si des récidives ou des métastases sont observées pendant le traitement ultérieur, des soins palliatifs seront mis en place pour réduire les complications liées à la tumeur et assurer le confort des animaux en stade avancé ou ultime de la maladie 3.

Les soins de soutien et les soins palliatifs peuvent se compléter ou se chevaucher dans certaines phases de la maladie, mais ils découlent tous d’une approche centrée sur l’animal. Une telle approche permet de le traiter dans sa globalité en respectant deux principes clés : un traitement multimodal et le partage des décisions avec le propriétaire. 

  • L’approche multimodale implique de contrôler la douleur, prendre en compte le pronostic, assurer le soutien nutritionnel, bien gérer les comorbidités et adoucir la phase du deuil. L’arthrose fait par exemple fréquemment souffrir les chiens et les chats âgés atteints de cancers, mais l’adaptation du protocole analgésique ou la physiothérapie peuvent améliorer leur mobilité. Les conséquences de certaines maladies hépatiques ou rénales sur le métabolisme des médicaments anticancéreux doivent également être prises en compte lors de l’élaboration du programme thérapeutique.
  • Partager les décisions avec les propriétaires est essentiel : ils doivent absolument être informés des suites à attendre du traitement, de son coût et du niveau d’engagement requis. La thérapie sera élaborée en fonction des besoins de l’animal, mais aussi en tenant compte des préférences des clients. Une communication transparente et empathique favorise l’approche collaborative pendant les soins, améliore les résultats du traitement et satisfait mieux les clients.
Un diagramme présentant les différentes phases des soins en cancérologie.

Figure 1. Diagramme montrant les différentes phases du traitement en cancérologie. D’après « Comprehensive Cancer Care Source », Institut national du cancer. EPEC™-O (Formation aux soins de soutien et aux soins palliatifs en fin de vie en oncologie).

Gestion de la douleur

Les douleurs liées au cancer peuvent provenir de la tumeur elle-même (Figure 2) ou être des effets secondaires du traitement (Tableau 1). Comme la douleur peut altérer significativement la mobilité de l’animal et augmenter le risque de mortalité, il est indispensable de la repérer et de la localiser précisément lors de la prise en charge d’un animal cancéreux. Chez les chiens et les chats atteints de cancers graves ou inopérables, la non-prise en compte des douleurs chroniques peut conduire à la sensibilisation du système nerveux central. Dans ce cas, la douleur n’est pas associée à des lésions tissulaires mais à une altération des mécanismes modulateurs de la douleur, à l’origine de sensations nociplastiques (résultant d’une altération de la nociception) 4. Sensibiliser les propriétaires à ce risque permet d’être attentif aux changements de comportement de l’animal à la maison. Cette collaboration facilite également l’approche proactive : le clinicien peut ainsi intervenir plus tôt dans le processus de la maladie et atténuer les douleurs qui apparaissent lors de son évolution. 

 

Tableau 1. Principales causes de douleur chez les animaux cancéreux.

Causes  Exemples
Tumeur initiale ou ses métastases 
   Compression tissulaire directe ; exemples : tissus mous, nerfs, vaisseaux 
   Infiltration osseuse
   Infiltration viscérale
Traitement du cancer  
 Chirurgie  Amputation d’un membre, mandibulectomie, mastectomie, etc.
 Chimiothérapie  Douleur gastro-intestinale : entérite, iléus
 Radiothérapie  Dermatite suintante, ulcération cutanée, mucosite
Chien atteint d’un large sarcome sur la paroi abdominale.

Figure 2. Image préopératoire d’un chien présentant un large sarcome vasculaire des tissus mous de la paroi abdominale, potentiellement à l’origine d’une douleur importante.
© Alexandra Guillén

En raison des modifications complexes du système sensoriel, la douleur chronique nécessite souvent d’appliquer une thérapie multimodale. Il est généralement recommandé de respecter une approche par paliers, en utilisant d’abord des médicaments disposant des meilleures preuves d’efficacité, tels que les inhibiteurs de la cyclooxygénase (COX) et aussi des non inhibiteurs, comme l’antagoniste des récepteurs EP4 ou le grapiprant. Si ces médicaments sont contre-indiqués ou si la douleur persiste, des médicaments de 2e intention peuvent être ajoutés, tels que la gabapentine, le paracétamol et l’amantadine 4. La prednisolone peut être envisagée (après une période de sevrage si des AINS ont été utilisés) chez les animaux dont les tumeurs répondent aux stéroïdes, comme les lymphomes, les leucémies et les tumeurs à mastocytes. Ils sont également indiqués dans le cas de tumeurs cérébrales et spinales, afin de réduire l’inflammation et l’œdème péritumoral. En 3e intention, des médicaments opioïdes, comme le tramadol et la buprénorphine par voie orale, sont généralement réservés aux douleurs réfractaires ou sévères.

L’anesthésie des blocs nerveux locorégionaux peut également être envisagée pour contrôler la douleur à court terme. Elle exige cependant de bien connaître l’anatomie et la technique d’injection, et de parfois s’appuyer sur un guidage échographique (Figure 3).

Un vieux chat atteint d’un carcinome maxillaire retrouve l’appétit après un blocage et un traitement du nerf infra-orbitaire.

Figure 3. Chat européen de 19 ans, stérilisé, atteint d’un carcinome épidermoïde avancé du maxillaire. Il était présenté pour une hyporexie et une douleur buccale. Après anesthésie du nerf infra-orbitaire et un traitement à l’acide zolédronique, le chat a retrouvé l’appétit.
© Alexandra Guillén

Parmi les autres stratégies non pharmacologiques figurent la chirurgie palliative pour les tumeurs de grande taille, ulcérées ou hémorragiques (Figure 4), la radiothérapie palliative (par exemple, pour les tumeurs osseuses primaires ou les métastases osseuses), les modifications de l’environnement, l’acupuncture et la supplémentation alimentaire en acides gras oméga 3 aux propriétés anti-inflammatoires.

Les tumeurs osseuses, primaires ou métastatiques, sont particulièrement douloureuses. La physiopathologie de l’ostéolyse induite par la tumeur est complexe, mais il est généralement admis qu’elle est médiée par les ostéoclastes, directement activés par les cytokines tumorales ou indirectement par les ostéoblastes. L’administration intraveineuse de bisphosphonates est connue pour inhiber efficacement la résorption osseuse. Elle a été utilisée avec succès chez le chien et le chat pour traiter les ostéosarcomes et les tumeurs osseuses envahissantes, ainsi que leurs métastases. Dans les deux espèces, la dose recommandée de pamidronate est de 1 à 2 mg/kg en perfusion de 2 heures toutes les 3 à 4 semaines ; pour le zolédronate, elle est de 0,1 à 0,25 mg/kg (jusqu’à 4 mg au maximum) en perfusion de 15 minutes toutes les 3 à 4 semaines 5,6.

De nouveaux analgésiques et des traitements non pharmacologiques sont aussi développés, avec des résultats prometteurs. Le bedinvetmab, un anticorps monoclonal (AMC) dirigé contre le facteur de croissance nerveuse (NGF), en est un exemple. En médecine humaine, le niveau endogène de NGF augmente chez les patients cancéreux et le potentiel thérapeutique des AMC a été démontré dans des modèles expérimentaux 7. Les AMC anti-NGF peuvent en outre soulager significativement la douleur provoquée par une tumeur osseuse et ralentir la progression de la croissance tumorale. Bien que des informations supplémentaires soient nécessaires chez les chiens et les chats cancéreux, l’auteure envisage de l’utiliser chez les chiens présentant un ostéosarcome et chez les chats atteints de carcinome épidermoïde oral ostéo-invasif 7.

La réévaluation du traitement analgésique sera faite lors des visites fréquentes de l’animal à la clinique, en s’appuyant sur l’observation de son comportement, la surveillance des variables physiologiques (fréquence cardiaque, pression artérielle), la palpation de la tumeur, le visionnage des vidéos faites à domicile et le suivi de l’activité. Les outils de mesure clinique peuvent aussi aider à évaluer l’efficacité du traitement mis en œuvre, mais les grilles disponibles ont été validées pour la douleur musculosquelettique (arthrose) et ne sont pas forcément adaptées aux chiens et aux chats cancéreux. Le Canine Brief Pain Inventory scale (https://www.vet.upenn.edu/docs/default-source/VCIC/canine-bpi.pdf) et le Feline Grimace Scale (www.felinegrimacescale.com) sont cependant des exemples de grilles permettant d’évaluer respectivement une douleur chronique chez le chien et le chat.

Un cockapoo atteint d’un gros mélanome amélanotique provoquant des saignements intermittents.

Figure 4. Chien mâle stérilisé de 9 ans atteint d’un gros mélanome amélanotique provoquant des saignements intermittents.
© Alexandra Guillén

Aspects nutritionnels

Une fois le diagnostic de cancer posé, les vétérinaires sont souvent interrogés à propos de l’intérêt de modifier le régime alimentaire. Une enquête récente a confirmé cette préoccupation des propriétaires : 25 % d’entre eux ont modifié le régime alimentaire de leur chien dans les six mois suivant le diagnostic du cancer 8. Chez les animaux cancéreux, les apports nutritionnels sont souvent compromis pour plusieurs motifs, notamment l’évolution des préférences alimentaires et les effets secondaires du traitement. L’appétit chute fréquemment : selon la chimiothérapie en place, cela concerne 17 à 76 % des chiens. Il est aussi bien connu que la chimiothérapie peut altérer le goût et l’odorat 9. Il est essentiel d’intervenir pharmacologiquement dès l’apparition des signes cliniques, en administrant des médicaments stimulant l’appétit tels que le maropitant, la mirtazapine, le métoclopramide, les glucocorticoïdes ou la cyproheptadine 10. Le développement de nouveaux médicaments et de nouvelles voies d’administration, comme la voie transdermique pour la mirtazapine, permet par exemple de mieux prendre en charge l’anorexie et la perte de poids chez le chat.

Aux États-Unis, l’utilisation d’un nouvel agoniste des récepteurs de la ghréline, la capromoréline, a été approuvé chez le chien et le chat par la FDA. Administrée à raison de 3 mg/kg par voie orale toutes les 24 heures, la solution entraîne une augmentation de la prise alimentaire et une prise de poids chez des chiens sains en laboratoire, mais aussi chez des chiens anorexiques à domicile 11. L’administration de 1 à 3 mg/kg de capromoréline toutes les 24 heures provoque aussi une augmentation durable du poids et du niveau d’IGF-1 chez le chat 12.

Le cancer perturbe la sécrétion de divers médiateurs (cytokines inflammatoires, cortisol, catécholamines, insuline, glucagon) et entraîne un dérèglement métabolique. Les acides aminés constituant les muscles sont alors utilisés comme principale source d’énergie, au détriment des graisses, et cela peut conduire à un syndrome d’anorexie-cachexie cancéreuse 13,14. La cachexie est définie comme une perte de masse maigre et chez l’Homme, il a été montré qu’elle est corrélée avec le pronostic de plusieurs cancers. Des associations similaires ont été trouvées chez les animaux cancéreux ; bien que la prévalence de la cachexie cancéreuse soit faible chez le chien (4 %), une étude a noté que 69 % des chiens présentaient une perte de poids et une fonte musculaire légère à sévère était présente dans 35 % des cas 15. Chez le chat cancéreux, une étude a évalué la prévalence de la cachexie à 6 %, tandis qu’une perte musculaire était observée chez 91 % des chats 16. De plus, chez les chats atteints de lymphome à grandes cellules ayant perdu au moins 5 % de leur poids après un mois de chimiothérapie, la survie était significativement plus courte que chez ceux qui ont pris du poids ou dont le poids est resté stable 17. Une autre étude a évalué l’effet de l’obésité sur la durée de survie des chiens présentant un lymphome ou un ostéosarcome : aucune association entre la note d’état corporel et la durée de survie n’a été notée lors d’ostéosarcome, mais en cas de lymphome, le temps de survie était significativement plus court chez les chiens de poids trop faible que chez ceux qui conservaient ou gagnaient du poids 18.

L’enjeu clinique du syndrome d’anorexie-cachexie cancéreuse a stimulé l’intérêt pour le développement d’aliments et de médicaments visant à améliorer l’apport énergétique et faciliter l’absorption des nutriments. Certaines voies métaboliques ont été ciblées pour inverser les effets cataboliques, augmenter la masse musculaire et favoriser la synthèse des protéines 14. La détection précoce de ce syndrome peut s’avérer difficile, mais, lorsqu’elle est possible, une intervention nutritionnelle individualisée peut aider à ralentir sa progression et à maintenir une meilleure qualité de vie. Les commémoratifs alimentaires doivent donc être soigneusement analysés lors de chaque examen clinique, en incluant les suppléments administrés, la note d’état corporel et le score de condition musculaire. Le vétérinaire doit s’assurer que le régime alimentaire est complet, équilibré et adapté aux caractéristiques cliniques de l’animal.

Pour les animaux traités par chimiothérapie, il peut être nécessaire d’aller plus loin pour protéger la santé du tube digestif et minimiser les effets secondaires des médicaments (Figure 5). Il s’agit souvent de modifier la quantité et la nature des fibres alimentaires, tout en veillant à conserver la digestibilité du régime proposé. Une supplémentation en huiles de poisson, riches en acides gras oméga 3, peut aussi aider à diminuer la production de cytokines inflammatoires, limiter la cachexie et augmenter la prise alimentaire 19.

Un cockapoo atteint d’un hémangiosarcome splénique recevant un traitement à la doxorubicine après une intervention chirurgicale.

Figure 5. Chienne stérilisée de 9 ans présentant un hémangiosarcome splénique, lors de son premier traitement à la doxorubicine, dix jours après la splénectomie.
© Alexandra Guillén

Si les sondes nasogastriques sont souvent utilisées en milieu hospitalier, une sonde œsophagienne ou de gastrostomie permet de nourrir efficacement l’animal par voie entérale à domicile à long terme. Une ration ménagère équilibrée, conseillée par un vétérinaire nutritionniste, est également envisageable bien qu’il soit préférable de la réserver aux stades avancés de la maladie.

Le Tableau 2 résume certaines des options disponibles pour aider à optimiser les apports nutritionnels des animaux cancéreux.

 

Tableau 2. Conseils nutritionnels pour les chiens et les chats cancéreux présentant une perte d’appétit ou une cachexie (d’après 13).

  • Donner des repas plus petits et plus fréquents au cours de la journée
  • Ajoutez des exhausteurs de goût (arômes de poisson ou de viande)
  • Modifier la température de l’aliment
  • Modifier la hauteur ou l’emplacement de la gamelle
  • Choisir la texture de l’aliment en fonction de l’état des dents de l’animal
  • Envisager un mode d’alimentation assistée ou interactive
  • Stimuler l’appétit si l’anorexie ou l’hyporexie dure depuis plus de 48 heures
  • Envisager la mise en place temporaire d’une sonde d’œsophagostomie (en particulier au début du traitement)
  • Augmenter l’apport en protéines de 1,5 à 2 fois par rapport au niveau d’entretien
  • Envisager l’ajout d’acides gras oméga 3
  • Contrôler toutes les sources possibles de douleur (liée ou non au cancer)

 

Les approches de médecine intégrative 

Les propriétaires d’animaux de compagnie sont de plus en plus enclins à utiliser l’acupuncture, les produits à base de cannabis, les massages, la phytothérapie, des champignons et des compléments alimentaires. Il est souvent difficile pour les vétérinaires de donner leur avis sur ces thérapies à cause du manque d’informations à propos de leur sécurité et de leur efficacité, mais quelques précisions peuvent quand même être apportées.

Le Yunnan Baiyao est un médicament traditionnel chinois qui figure parmi les thérapies complémentaires. Il est censé améliorer la fonction plaquettaire et avoir des propriétés anti-inflammatoires et anticancéreuses. La formule exacte de cette préparation à base de plantes est un secret commercial, mais, en raison de la pression croissante en faveur de l’assurance qualité et du développement des bonnes pratiques de fabrication, ses principaux composants sont désormais mentionnés sur l’étiquette. Le Yunnan Baiyao est utilisé en complément du traitement des tumeurs à tendance hémorragique, comme l’hémangiosarcome viscéral et les tumeurs nasales 20.

Pour traiter la douleur, l’acupuncture et l’huile de cannabidiol (CBD) sont systématiquement incluses dans l’approche multimodale du traitement du cancer, au sein de la structure hospitalière de l’auteure. L’acupuncture consiste à piquer des aiguilles sur des points spécifiques de la peau (Figure 6) et ses effets sont en partie dus à la cascade d’endorphines, de monoamines et de cytokines anti-inflammatoires produites. Même si son intérêt est peu documenté en médecine vétérinaire, l’acupuncture a largement été utilisée pour traiter la douleur en médecine humaine. Certaines études suggèrent qu’elle peut également servir à traiter les nausées et les vomissements induits par la chimiothérapie, et qu’elle favoriserait l’immunité anticancéreuse 21,22.

L’huile de CBD retient également l’attention : en plus de stimuler éventuellement l’appétit, des effets anti-inflammatoires, analgésiques, antioxydants, antiémétiques et immunomodulateurs (entre autres) sont attribués à sa fixation sur les récepteurs cannabinoïdes de type 1 et 2. Les propriétés antitumorales de l’huile de CBD ont également été étudiées (seule ou associée à une chimiothérapie), avec des résultats prometteurs 23. Une étude in vitro récente a montré que le CBD induisait l’autophagie et l’apoptose des lignées cellulaires impliquées dans l’ostéosarcome canin, le carcinome mammaire et le lymphome à cellules B, ce qui justifierait des essais cliniques 24. Le principal frein à son utilisation clinique chez le chien et le chat est l’absence de données pharmacocinétiques spécifiques à propos des interactions potentielles avec d’autres médicaments, en particulier ceux administrés lors de chimiothérapie 23,24.

L’utilisation de l’acupuncture chez un Ragdoll comme approche de médecine intégrative.

Figure 6. Chat ragdoll, mâle stérilisé de 17 ans, soigné par acupuncture (aiguilles rouges) dans le cadre du traitement multimodal d’un carcinome nasal avancé.
© Alexandra Guillén

Les défis à relever

Il existe un besoin croissant de médecine factuelle pour évaluer l’efficacité des traitements utilisables chez les chiens et les chats recevant des soins de soutien et des soins palliatifs. Cela implique d’utiliser des modèles d’étude adéquats, de définir des critères d’évaluation clairs et spécifiques, et de pouvoir quantifier les résultats obtenus. En outre, il est de plus en plus important de développer des outils adaptés pour évaluer la qualité de vie et la douleur chronique chez les animaux cancéreux.

Conclusion

Le traitement du cancer doit intégrer des procédures de réadaptation tout au long du processus, depuis le diagnostic jusqu’à la fin de la vie de l’animal. Une intervention précoce peut améliorer la qualité de vie et réduire la mortalité à court terme. Une meilleure connaissance des besoins des chiens et des chats peut aider les vétérinaires à anticiper les complications liées aux tumeurs et aux traitements.

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Alexandra Guillén

Alexandra Guillén

Diplômée de l’Université autonome de Barcelone (Espagne), la Dre Guillén a été interne dans le service des animaux de compagnie dans le même établissement, en 2014 En savoir plus